Photosynthèse artificielle : l’étape clé de la photo-accumulation de charges reproduite

Résultats scientifiques Molécules

Des chercheurs du Laboratoire de Chimie et Biologie des Métaux (CNRS/CEA/UGA), du Département de Pharmacochimie Moléculaire (UGA/CNRS), du laboratoire SyMMES (UGA/CNRS/CEA) et de l’Université de Jena en Allemagne ont conçu un photosensibilisateur, un complexe de ruthénium, capable de stocker de manière réversible deux électrons et deux protons. Cette découverte, parue dans Chemical Science, pourrait contribuer à lever un des verrous limitant l’efficacité de la photosynthèse artificielle.

La photosynthèse est une fascinante source d’inspiration pour concevoir des dispositifs moléculaires innovants, comme les cellules photo-électrochimiques à colorants qui permettent de convertir et stocker l’énergie solaire sous la forme d’un carburant : hydrogène (H2) par réduction des protons de l’eau ou des carburants carbonés issus de la réduction du dioxyde de carbone. D’un point de vue fondamental, ces dispositifs reproduisent trois étapes clés de la photosynthèse : l’absorption de l’énergie lumineuse, la séparation de charges photo-induite, la catalyse de la réaction qui produit les carburants en impliquant plusieurs électrons. Mais leur efficacité est actuellement limitée par une propriété intrinsèque du système : les électrons sont délivrés un par un par le photosensibilisateur alors qu’ils sont utilisés deux par deux par le catalyseur, dans le cas de la production d’hydrogène. La nature résout ce problème avec une étape intermédiaire de photo-accumulation de charges. Dans l’optique d’intégrer ce processus intermédiaire dans un dispositif de photosynthèse artificielle, les chimistes ont conçu un nouveau photosensibilisateur possédant un site de photo-accumulation de charges. Grâce à différentes techniques électrochimiques et spectroscopiques combinées avec des calculs théoriques, ils ont mis en évidence que ce complexe de ruthénium, placé sous irradiation lumineuse et en présence d’une source d’électrons, a effectivement la capacité de stocker de manière réversible deux électrons et deux protons. Ce mécanisme, qui rappelle celui des plastoquinones, relais d’électrons de la chaîne photosynthétique naturelle, représente une sérieuse piste pour augmenter l’efficacité de futurs dispositifs de photosynthèse artificielle.

Ces travaux, financés par le Labex grenoblois Arcane et le programme CEA-DRF Impulsion 2017, ouvrent de nouvelles perspectives en photocatalyse bio-inspirée pour l’énergie.

 

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En haut : Structure du photosensibilisateur et réactivité a) en présence de lumière et d’une source d’électrons, la triéthylamine ; b) réversibilité du processus lors de l’exposition à l’air.
En bas : Structure et réactivité des plastoquinones de la chaine photosynthétique.

©Murielle Chavarot-Kerlidou

 

 

Référence

J.-F. Lefebvre, J. Schindler, P. Traber, Y. Zhang, S. Kupfer, S. Gräfe, I. Baussanne, M. Demeunynck, J.-M. Mouesca, S. Gambarelli, V. Artero, B. Dietzek, M. Chavarot-Kerlidou
An artificial photosynthetic system for photoaccumulation of two electrons on a fused dipyridophenazine (dppz)–pyridoquinolinone ligand
Chemical Science – Avril 2018
DOI: 10.1039/C7SC04348A

 

 

Contact

Murielle Chavarot-Kerlidou
Chercheuse, Laboratoire de chimie et biologie des métaux (Université Grenoble Alpes/CNRS/CEA)
Sophie Félix
Chargée de communication
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC