Des aimants pour accélérer le transfert d’électrons dans les nanotubes de carbone

Résultats scientifiques Matériaux

Une équipe internationale de chercheurs a découvert un moyen de contrôler le transport des électrons dans des réseaux composés des plus petits conducteurs électriques connus : les nanotubes de carbone. En fixant chimiquement sur ces nanotubes des nanoparticules magnétiques de gadolinium, un élément des terres rares, les chercheurs ont modifié les propriétés magnétiques et électriques du matériau, comme sa résistance qui augmente à très basse température. Des caractéristiques qui pourraient trouver des applications dans le domaine de la nanoélectronique. Ces travaux réalisés en collaboration entre plusieurs universités sud-africaines (Johannesburg), le Max Planck Institute de Dresde et le CIRIMAT (CNRS/Université Toulouse III/INP Toulouse) ont été publiés dans Scientific Reports.

Depuis leur découverte il y a 25 ans, les scientifiques pensent que les nanotubes de carbone joueront un rôle dans de multiples avancées technologiques majeures. Ils intéressent notamment le domaine de la nanoélectronique pour leur capacité à transporter des électrons à très grande vitesse. En vue d’applications en nanoélectronique, des chercheurs du CIRIMAT (CNRS/Université Paul Sabatier/INP Toulouse) et des Universités sud-africaines de Witwatersrand et de Johannesburg ont réussi à augmenter la conductivité électronique déjà particulièrement élevée des réseaux de nanotubes de carbone.

Partant du principe qu’un aimant placé à proximité d’un conducteur électronique peut modifier le transfert d’électrons, les scientifiques ont voulu vérifier si la greffe de nanoparticules magnétiques sur des nanotubes de carbone pouvait augmenter ou inhiber le transport des électrons qui les traversent. Pour répondre à cette question, ils ont synthétisé des nanotubes de carbone multi-parois, composés de plusieurs plans de graphène arrangés en cylindres concentriques. Ces nanotubes ont ensuite été fonctionnalisés chimiquement, avec une greffe d’un assemblage complexe d’atomes contenant des nanoparticules de gadolinium, un élément des terres rares choisi pour sa capacité à former des aimants.

Les tests effectués sur ce nouveau matériau ont effectivement détecté des propriétés inhabituelles. Les chercheurs ont notamment pu déceler un effet très recherché dans le domaine de la nanoélectronique, l’effet Kondo qui se traduit par une augmentation de la résistance du matériau en dessous de 98 degrés Kelvin (-175 °C). Les chercheurs ont également montré que les flux d’électrons sont effectivement sensibles à la présence de gadolinium à la surface des tubes : ces flux sont ralentis ou accélérés en fonction des orientations magnétiques de nanoparticules de gadolinium. Ce phénomène, connu sous le nom d’effet « spin valve », trouve une large application dans le développement de disques durs utilisés pour le stockage de données. C'est la première fois qu'un tel effet est démontré dans des réseaux de nanotubes de carbone, sans ajout d'électrode magnétique.

Grâce à leurs propriétés particulières et la mise en œuvre facile de la fonctionnalisation des nanotubes proposée dans ces travaux, ces derniers pourraient trouver des applications dans des domaines émergents tels que l'informatique quantique, qui a pour ambition de décupler la puissance de calcul des ordinateurs classiques.

 

Image retirée.
©Emmanuel Flahaut

 

 

 

Référence

S. Ncube, C. Coleman, A. Strydom, E. Flahaut, A. de Sousa, S. Bhattacharyya
Kondo effect and enhanced magnetic properties in gadolinium functionalized carbon nanotube supramolecular complex
Scientific Reports - Mai 2018
DOI:10.1038/s41598-018-26428-y

 

 

Contact

Sophie Félix
Chargée de communication
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC