Des assemblages macroscopiques à la chiralité contrôlée

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Un médicament sera plus efficace et moins toxique s’il ne contient qu’une seule des deux espèces sous lesquelles se présentent les molécules chirales. Or comprendre pourquoi et comment les molécules expriment leur chiralité dans les auto-assemblages et les superstructures reste aujourd'hui un challenge. Dans leurs travaux publiés dans Nature Communications, des chercheurs du Centre de recherche Paul Pascal (CNRS/Université de Bordeaux) ont réussi à contrôler la morphologie hélicoïdale de cristaux issus de l'auto-assemblage de particules biologiques chirales modèles. Une première étape vers une méthode de sélection des espèces chirales droites et gauches d’une solution.

Une molécule chirale se présente sous deux formes, images l’une de l’autre dans un miroir mais non superposables, comme une très petite vis qui peut être du type « tourne à droite » ou du type « tourne à gauche ». Une solution contient habituellement les deux espèces mais, dans de nombreuses applications, depuis la pharmacologie jusqu’à l’élaboration de matériaux pour les nanotechnologies, elles doivent être séparées. Des chercheurs du Centre de recherche Paul Pascal (CNRS/Université de Bordeaux) ont mis au point une nouvelle méthode qui leur a permis de contrôler la chiralité non d’une seule molécule mais d’assemblages macroscopiques de particules chirales.

Les chercheurs ont travaillé avec des virus « fd » : ces particules biologiques modèles sont des bâtonnets nanométriques chiraux, droits ou gauches, selon le type. En solution et dans des conditions appropriées, ces bâtonnets s’assemblent en petits disques de quelques micromètres de diamètre, assez grands pour être manipulés et triés via des techniques d’ingénierie colloïdale. Ils ont de plus la propriété remarquable de former, par auto-assemblage, des figures de « dislocation vis » qui ressemblent à des rondelles frein utilisées en mécanique. Ces structures sont elles-mêmes des objets chiraux, droits ou gauches. En jouant sur la concentration initiale des virus et sur le temps d’incubation des disques, l’équipe a déterminé les conditions pour que les « virus droits » s’assemblent en « rondelles droites » et inversement pour les éléments gauches.

Le procédé est une première : les chercheurs ont réussi à contrôler la chiralité d’assemblages macroscopiques et à moduler leur hélicité en jouant sur les conditions de croissance de ces objets. À terme, le procédé pourrait évoluer vers une méthode efficace pour filtrer durant leur cristallisation des espèces chirales gauches et droites présentes au sein d’une solution.

 

Image retirée.
Assemblage de virus « fd » présentant une « dislocation vis » observé en microscope optique de fluorescence (gauche) et représentation schématique de sa structure (milieu), qui ressemble à des rondelles frein utilisées en mécanique (droite).

©Éric Grelet
 

 

 

Référence

Baeckkyoung Sung, Alexis de la Cotte, Eric Grelet 
Chirality-controlled crystallization via screw dislocations
Nature Communications – Avril 2018
DOI : 10.1038/s41467-018-03745-4

Contact

Sophie Félix
Chargée de communication
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC