Un auto-assemblage moléculaire pour protéger et transmettre le matériel génétique

Résultats scientifiques Vivant et santé

Pour fonctionner, les thérapies géniques ont besoin de l’internalisation de matériel génétique, ADN ou ARN, dans des cellules. Extrêmement simples et terriblement efficaces, certains virus ne sont constitués que de deux molécules différentes : un ARN et une protéine présente un grand nombre de fois. Ces assemblages coopératifs forment à la fois des architectures complexes et un moyen de transport de matériel génétique. Des chercheurs de l’IPCM, de l’iPLESP et de PASTEUR sont parvenus à reproduire artificiellement le phénomène avec de la cyclodextrine. Judicieusement modifiée, cette chaîne cyclique de glucose peut s’autoassembler au point de permettre l’internalisation d’ARN, selon ces travaux publiés dans Angewandte Chemie International Edition.

Avec le procédé dit de transfection, les virus transfèrent leurs gènes aux cellules qu’ils ciblent. Si le phénomène est mimé en thérapie génique, les méthodes actuelles peuvent s’avérer toxiques pour les cellules. Des chercheurs de l’Institut Parisien de Chimie Moléculaire (IPCM, CNRS/Sorbonne Université), de l’Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique (Inserm/Sorbonne Université/APHP) et du laboratoire Processus d’activation sélectif par transfert d’énergie uni-électronique ou radiatif (PASTEUR, CNRS/Sorbonne Université/ENS Paris) ont prouvé que l’on pouvait utiliser une cyclodextrine, un oligomère de sucres cyclique d’origine naturelle, chimiquement modifiée comme vecteur.

Soluble dans l’eau tout en présentant une cavité hydrophobe, la cyclodextrine peut inclure une molécule hydrophobe en son sein. Cette capture est par exemple utilisée pour encapsuler les molécules malodorantes et réduire leur volatilité. Les chercheurs ont ici substitué une partie de la molécule par un élément hydrophobe et lié deux groupements azotés. L’élément ajouté cherche alors à se loger dans la cavité hydrophobe de sa propre molécule, mais le pont entre les azotes l’en empêche. Seule solution, s’installer dans la cavité d’une cyclodextrine voisine. Les molécules sont donc forcées de s’auto-assembler les unes aux autres, jusqu’à former des architectures assez longues pour s’associer efficacement à de l’ADN ou de l’ARN. Cela permet de les transporter à l’intérieur d’une cellule à l’instar d’un virus, mais sans toxicité.

 

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©Matthieu Sollogoub

 

 

Référence

Pierre Evenou, Julien Rossignol, Gaëlle Pembouong, Adélie Gothland, Dmitri Colesnic, Renaud Barbeyron, Sergii Rudiuk, Anne-Geneviève Marcelin, Mickaël Ménand, Damien Baigl, Vincent Calvez, Laurent Bouteiller, Matthieu Sollogoub
Bridging ß-Cyclodextrin Prevents Self-Inclusion, Promotes Supramolecular Polymerization, and Promotes Cooperative Interaction with Nucleic Acids
Angewandte Chemie Internatinal Edition – Juin 2018
DOI: 10.1002/anie.201802550

 

 

Contact

Matthieu Sollogoub
Enseignant-chercheur à l’Institut parisien de chimie moléculaire (CNRS/Sorbonne Université)
Sophie Félix
Chargée de communication
Stéphanie Younès
Responsable Communication - Institut de chimie du CNRS
Christophe Cartier dit Moulin
Chercheur à l'Institut parisien de chimie moléculaire & Chargé de mission pour la communication scientifique de l'INC