Born-Oppenheimer ne relève plus de l'approximation
L'une des approximations majeures en mécanique quantique est connue comme l'approximation de Born-Oppenheimer, qui suppose que le mouvement des noyaux dans les molécules peut être séparé de celui des électrons environnants. Mais l'inertie des électrons, qui modifie la masse effective, est complètement négligée. Une équipe du Laboratoire PASTEUR (CNRS/ENS/UPMC) en collaboration avec le Max Planck Institut für Mikrostrukturphysik de Halle a développé une technique pour prendre en compte l’inertie des électrons induite par le mouvement des noyaux. Ces travaux sont publiés dans la revue Physical Review X.
En mécanique quantique, les chercheurs doivent souvent se tourner vers des approximations mathématiques pour décrire le fonctionnement interne des atomes et des molécules, en vue de comprendre le plus finement possible la matière et ses interactions. L'une des approximations majeures est connue comme l'approximation de Born-Oppenheimer, qui suppose que le mouvement des noyaux dans les molécules peut être séparé de celui des électrons environnants. En faisant cette hypothèse, il faut assigner une masse au noyau, qui est, dans cette approximation, la masse nucléaire « nue ». Mais l'inertie des électrons, qui modifie la masse effective, est complètement négligée, ce qui se traduit par des problèmes fondamentaux et pratiques lorsque des prédictions théoriques sont nécessaires pour répondre à la précision expérimentale.
Une équipe du laboratoire PASTEUR, en collaboration avec le Max Planck Institut für Mikrostrukturphysik de Halle, a développé une technique pour prendre en compte les effets de la vitesse des noyaux sur la structure électronique. Ces corrections à la structure électronique, corrections de type non-adiabatiques, décrivent l’inertie des électrons induite par le mouvement des noyaux. Cette nouvelle approche théorique résout cette incohérence de quatre-vingts ans dans l'approximation de Born-Oppenheimer.
Leur méthodologie conduit à un schéma numérique assez efficace pour fournir les premières prédictions des corrections non-adiabatiques aux fréquences vibratoires au-delà des molécules diatomiques et triatomiques. Ceci ouvre la voie à des calculs de spectres vibrationnels d’une précision inégalée pour des applications en astrophysique par exemple.
Cette nouvelle approche ouvre des perspectives comme connaître les courants électroniques induits par les mouvements nucléaires. Etudier ces courants au cours d’une réaction chimique peut permettre de mieux comprendre les mécanismes réactionnels comme lors de réactions péricycliques où les descriptions traditionnelles mécanistiques restent à ce jour ambigües.
Référence
Arne Scherrer, Federica Agostini, Daniel Sebastiani, E. K. U. Gross & Rodolphe Vuilleumier
On the Mass of Atoms in Molecules: Beyond the Born-Oppenheimer Approximation
PHYSICAL REVIEW X 25 août 2017