La Spironolactone : une thérapie anti-VIH accessible et bon marché ?

Résultats scientifiques

Des chercheurs de l’Institut Cochin révèlent une action anti-Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH) dans les lymphocytes T de la spironolactone, un médicament générique utilisé comme antihypertenseur depuis des décennies. En ciblant un facteur cellulaire, cette molécule bloque la transcription des gènes du virus et par conséquent l'infection des cellules T par le virus. Ces travaux qui pourraient conduire à un traitement anti-VIH à très bas coût ont été publiés le 28 septembre dans la revue Journal of Virology.

Le Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH) possède un cycle de réplication lui permettant de s’introduire dans le génome de la cellule infectée et d’y persister tout au long de la vie de l’hôte. Les thérapies actuelles se concentrent sur différentes étapes du cycle de multiplication virale, mais de nouvelles pistes sont explorées afin d’augmenter l’efficacité des traitements, de diminuer le développement des virus résistants ou de maintenir les virus inactifs dans les cellules infectées difficiles à éliminer.
Une des étapes essentielles du cycle de multiplication virale et aujourd’hui non ciblée par les molécules antivirales, est la transcription. La transcription synthétise les nouveaux composants du virus tels que le génome viral (ARN) et les ARN messagers nécessaires à la synthèse des protéines virales par la machinerie cellulaire, ce qui permet au virus de se multiplier dans l’hôte. Cette étape est réalisée par des composants viraux mais également par des protéines cellulaires détournées par le virus. Comprendre et analyser les mécanismes par lesquels le virus détourne ces cofacteurs cellulaires ainsi que la résolution de leurs mécanismes d’action, est un enjeu majeur afin d’éradiquer le virus.
Dans cette optique, en étudiant des facteurs cellulaires nécessaires au virus, les chercheurs de l’Institut Cochin se sont concentrés sur le complexe de transcription TFIIH qui est un composant de la machinerie cellulaire de la transcription. Ils ont utilisé la Spironolactone qui avait été montrée dans la littérature comment étant capable d’induire la dégradation de manière spécifique et réversible d’un des membres du complexe TFIIH, la protéine XPB. De manière surprenante, cette molécule s’est avérée capable de bloquer très fortement la multiplication du virus dans les lymphocytes sans affecter les fonctions cellulaires importantes dans lesquelles le complexe TFIIH est impliqué.
Les effets observés lors du traitement des cellules par la Spironolactone sont innovants car les thérapies actuelles contre le VIH ciblent exclusivement des composants du virus. En outre, cibler un élément cellulaire pourrait limiter l’apparition de virus résistants.

La Spironolactone est une molécule très bien décrite, peu couteuse, et largement utilisée depuis des décennies en clinique humaine. Il serait particulièrement intéressant de tester son utilisation dans le cadre d’un traitement antiviral contre le VIH.

 

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Figure 1: La Spironolactone empêche la multiplication du VIH dans les cellules T cibles du virus.

© Benoît Lacombe
 

 

 

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Figure 2: La Spironolactone entraîne une dégradation rapide, spécifique et réversible de la protéine XPB, membre du complexe TFIIH. Cette action sur la protéine XPB empêche la transcription des gènes du VIH dans les lymphocytes T où le virus est intégré. La multiplication du virus en est fortement affectée ce qui limite sa propagation vers les cellules non infectées de l’hôte.

© Benoît Lacombe & Cecilia Ramirez

Image illustrant le résumé: © Patrycja Nzounza & Cecilia Ramirez

 

En savoir plus

  • Specific Inhibition of HIV Infection by the Action of Spironolactone in T Cells 
    Benoît Lacombe, Marina Morel, Florence Margottin-Goguet, and Bertha Cecilia Ramirez
    J. Virol. December 2016 ; 90:23 9 10972-10980. Online 28 September 2016 .doi:10.1128/JVI.01722-16

     

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Cécilia Ramirez