Les vésicules extracellulaires : de nouveaux régulateurs des cellules souches du sang

Résultats scientifiques

Les cellules souches hématopoïétiques (CSH), sont intimement régulées par des cellules stromales selon des mécanismes encore peu connus. Une équipe de l’Institut de biologie Paris-Seine montre que les cellules stromales sécrètent des vésicules extracellulaires qui sont spécifiquement capturées par les CSH et dont le contenu régule leurs propriétés. Cette étude qui ouvre la voie au ciblage des CSH normales et pathologiques par des molécules d’intérêt thérapeutique, a été  publiée le 3 juillet 2017 dans la revue The Journal of Cell Biology.

Les cellules souches hématopoïétiques (CSH) constituent une rare population de cellules localisées dans la moelle osseuse chez l’adulte, responsable de la production tout au long de la vie des différentes lignées de cellules sanguines. Leur dérèglement peut également être à l’origine de diverses pathologies du système sanguin telles que les leucémies. Il est maintenant bien établi que les CSH résident dans des microenvironnements (appelés ‘niches’) constitués de cellules stromales. Ces dernières jouent un rôle essentiel dans la survie, l’auto-renouvellement et la différenciation des CSH. Décrypter le dialogue moléculaire qui s’établit entre les CSH et les cellules stromales en conditions physiologiques et pathologiques constitue un enjeu de tout premier plan en biologie fondamentale et en médecine régénérative. Ce dialogue, qui met en jeu des molécules de signalisation et des processus de remodelage de la matrice extracellulaire et d’adhésion cellulaire, reste très largement méconnu.

 

Afin de mieux comprendre comment les cellules stromales régulent l’activité des CSH, les chercheurs de l’Institut de Biologie Paris-Seine ont utilisé des lignées de cellules stromales se différenciant clairement sur le plan fonctionnel par leur capacité unique à soutenir de façon robuste ou non les CSH ex vivo. Une lignée supportrice permet de conserver des CSH fonctionnelles en culture pendant plusieurs jours alors qu’une lignée non supportrice entraine la perte de la capacité CSH et la mort des cellules.  En utilisant des approches de microscopie électronique, de cytométrie en flux et de biologie moléculaire, les chercheurs révèlent que les deux types de cellules stromales (supportrices et non supportrices) produisent des vésicules extracellulaires (VE). De façon importante, les CSH capturent, selon un mécanisme encore inconnu, uniquement les VE sécrétées par les cellules stromales supportrices à la fois ex vivo et in vivo. Des approches de séquençage à haut débit couplées à des analyses bioinformatiques montrent que les VE capturées par les CSH contiennent une signature moléculaire d’une grande complexité, incluant des ARN longs et courts, différente de la signature moléculaire de la cellule d’origine. Enfin, la combinaison de tests biologiques appropriés et l’analyse du transcriptome des CSH exposées ou non aux VE, montre que celles-ci régulent le potentiel des CSH (vraisemblablement en les protégeant de la mort cellulaire programmée) et influencent largement leur profil d’expression génétique.

 

Cette étude met donc en évidence le rôle majeur joué par les VE d’origine stromale dans le dialogue entre les CSH et leur microenvironnement. Identifier les molécules transmises aux CSH via les VE et comprendre les mécanismes moléculaires et cellulaires impliqués dans l’adressage spécifique des VE vers les CSH constituent les prochains défis à relever par les chercheurs. Ces recherches devraient permettre des avancées majeures en médecine régénérative pour délivrer dans les CSH des molécules d’intérêt thérapeutique et/ou des facteurs permettant de les amplifier ex vivo à des fins de thérapie cellulaire.

 

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Figure : Microscopie électronique à transmission d’une cellule stromale supportrice des CSH. Un éclairage du cytoplasme révèle la présence de nombreux corps multi-vésiculaires. L’agrandissement de ces structures montre qu’ils contiennent des vésicules de plus petite taille qui sont sécrétées par les cellules stromales. Leur marquage (en vert) prouve qu‘elles sont capturées par les cellules souches hématopoïétiques (dont la membrane plasmique est marquée en rouge).

© Sophie Gournet

 

 

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Contact

Thierry Jaffredo
Directeur de recherche CNRS