Discrimination visuelle chez le lion de mer australien

Résultats scientifiques

Une étude menée par Isabelle Charrier à l'Institut des neurosciences Paris Saclay, en collaboration avec Rob Harcourt à l'université Macquarie (Australie) dans le cadre du Laboratoire International Associé "Multimodal Communication in Marine Mammals", démontre que les signaux visuels jouent un rôle important dans les retrouvailles mère-jeune chez le lion de mer australien, et permet donc de faciliter l’identification du jeune par sa mère. Ces travaux ont été publiés le 1er novembre 2017 dans la revue Biology Letters.

Le lion de mer australien Neophoca cinerea se reproduit à terre, et forme ainsi des colonies de centaines d’individus. La femelle donne naissance à un unique petit qu’elle va allaiter pendant 17-18 mois. Pendant la lactation, les femelles doivent fréquemment partir en mer pour reconstituer leur réserve énergétique et donc pouvoir allaiter leur petit pendant ces 18 mois. A chacun des retours de ces voyages alimentaires, la mère et son petit doivent se retrouver dans la colonie.


Les précédentes études par les chercheurs sur le lion de mer australien ont montré que mères et jeunes se reconnaissent vocalement et que la mère est aussi capable d’identifier olfactivement son petit. Ils se sont alors demandé si les mères pouvaient aussi utiliser les signaux visuels pour faciliter les retrouvailles avec leurs petits. En effet, le lion de mer australien a un cycle de reproduction particulier, puisque les naissances sont asynchrones par rapport aux autres espèces de pinnipèdes (phoque, otarie à fourrure, lion de mer et morse), et donc les naissances se font sur une période pouvant aller jusqu’à 7 mois. Ainsi, à un instant donné dans la colonie, on peut trouver des jeunes d’âges très variables, avec des tailles et des couleurs de pelage très différentes. De la naissance à 2 mois, les jeunes ont un pelage noir, puis entre 2 et 4 mois leur pelage passe au brun/cannelle, puis après 4 mois, les jeunes muent et présentent alors leur pelage adulte soit gris et beige.


Les chercheurs ont donc testé les femelles avec des modèles 3D : leurres visuels en fourrure synthétique de taille et couleurs différentes, adaptée en fonction des 3 classes d’âges (A1: 0-2 mois, A2: 2-4 mois, A3: 4-6 mois). Trente femelles ont été soumises à un test de choix avec 2 modèles, un d’âge similaire à celui de son jeune et un autre modèle d’âge différent (de classe d’âge inférieure ou supérieure voir photo). Ils ont pu constater que les femelles réagissent différemment à ces 2 modèles. En effet, soit les femelles sont très agressives envers le modèle de classe d’âge différente de leur petit (morsures, cris d’agressivité), soit elles sont attirées vers le modèle de classe d’âge similaire à celui de leur jeune (multiples investigations olfactives du modèle). Cette étude montre donc très clairement que les signaux visuels (taille et couleur du pelage) sont utilisés par les femelles lors des retrouvailles, ils permettent à la femelle de faire « un tri » entre les différents jeunes et donc de faciliter le processus de reconnaissance individuelle. Ces résultats vont permettre maintenant de pouvoir s’intéresser à l’implication des signaux visuels dans la reconnaissance individuelle, et notamment de tester si les femelles peuvent reconnaitre individuellement leur petit.

 

Image retirée.
Figure. Test double choix sur une femelle lion de mer australien. A gauche, les 2 modèles d’âge différents (A1 et A2), et à droite le petit de la femelle testée (A2)

©Isabelle Charrier
 

 

 

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