Médicament anti-apeline : l’appel au secours des tumeurs du cerveau

Résultats scientifiques

Le glioblastome est une tumeur du cerveau incurable avec une survie médiane de 15 mois. Une nouvelle approche propose de cibler les cellules souches tumorales qui sont logées au sein d’une niche vasculaire en interaction étroite avec l’endothélium cérébral. L’équipe de Julie Gavard au Centre de recherche en cancérologie et immunologie de Nantes-Angers, révèle le rôle essentiel de l’apeline, une petite protéine produite par l’endothélium, dans le maintien des propriétés de ces cellules in vitro et dans la progression tumorale in vivo. Cette étude a été publiée le 3 octobre  2017 dans la revue Brain.

Dans les pays occidentaux, moins de 5% des patients diagnostiqués chaque année pour une tumeur du cerveau maligne survivra plus de 5 ans. C’est cette tumeur, le glioblastome, qui a dévasté le cinéaste François Truffaut et dont a été récemment opéré le sénateur américain John McCain. Les traitements actuels font appel à une chirurgie invasive et des cycles répétés de rayons et de chimiothérapie. Malgré ces efforts thérapeutiques, le glioblastome reste incurable avec une survie médiane de 15 mois. Ce cancer demeure donc un des plus mortels chez l’homme.

 

Une nouvelle stratégie serait de cibler un groupe minoritaire des cellules cancéreuses, mimant les propriétés des cellules souches neurales adultes. Ces cellules souches du cancer serviraient de réservoir de cellules autonomes capables d'initier, maintenir et renouveler la tumeur, notamment après les traitements. Des travaux incluant ceux de l’équipe de Julie Gavard, ont identifié ces cellules souches du cancer (CSCs) à proximité des vaisseaux sanguins dans les tumeurs humaines du cerveau. Ces cellules sont ainsi logées au sein d’une niche vasculaire en interaction étroite avec l’endothélium cérébral. L’équipe de Julie Gavard propose que des signaux endothéliaux assurent le maintien des propriétés des CSCs et cherche à caractériser de nouveaux composés capables d’interférer avec la communication entre cellules endothéliales et les cellules souches du glioblastome.

 

Dans ce contexte, les chercheurs ont développé un modèle de co-culture de deux types de cellules: des cellules souches de glioblastome isolées de patients après chirurgie, et des cellules vasculaires cérébrales humaines normales. Les résultats obtenus mettent en avant l’existence de signaux de communication sécrétés par les cellules endothéliales des vaisseaux sanguins et contrôlant les propriétés des CSCs. Une étude protéomique entamée à l’Institut Cochin à Paris, a permis d’identifier l’apeline, un petit peptide hormonal agissant sur un récepteur à sept domaines transmembranaires. Les travaux poursuivis au Centre de Recherche en Cancérologie et Immunologie de Nantes-Angers, montrent le rôle instrumental de l’apeline produite par l’endothélium dans le maintien des propriétés des CSCs ex vivo et dans la progression tumorale in vivo, notamment à l’aide de modèles expérimentaux impliquant le transfert intracrânien chez la souris de cellules isolées de patients. En collaboration avec des pharmacologues et chimistes de l’Université de Cambridge au Royaume-Uni, les chercheurs apportent la preuve de concept qu’un antagoniste de l’apeline entrave l’expansion des CSCs et réduit la croissance tumorale.

 

Cette molécule n’a montré aucune toxicité in vitro et in vivo, et semble douée de propriétés pharmacodynamiques intéressantes. Plus important, l’administration répétée de cet inhibiteur permet de ralentir l’apparition de signes neurologiques et la mort des animaux porteurs de tumeurs. Ces résultats pourraient offrir des nouvelles perspectives cliniques innovantes, telles que le développement de stratégies thérapeutiques visant les cellules cancéreuses à caractère souche.

 

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Figure : Des cellules de patients atteints d’un glioblastome ont été implantées dans le cerveau de souris. Les souris ont ensuite reçu un traitement trois fois par semaine du placebo ou du composé chimique MM54 ciblant le récepteur à l’apeline (représentation dans le graphe). L’histologie des cerveaux des souris montre une réduction de la taille de la tumeur à la fin du traitement par le MM54. La survie des deux groupes de souris a également été suivie tout au long de l’expérience, et cette analyse montre clairement un avantage de survie pour les souris ayant reçu le MM54.

© Julie Gavard

 

 

En savoir plus

  • Pharmacological targeting of apelin impairs glioblastoma growth. 
    Harford-Wright E, André-Grégoire G, Jacobs KA, Treps L, Le Gonidec S, Leclair HM, Gonzalez-Diest S, Roux Q, Guillonneau F, Loussouarn D, Oliver L, Vallette FM, Foufelle F, Valet P, Davenport AP, Glen RC, Bidere N, Gavard J.
    Brain, awx253, https://doi.org/10.1093/brain/awx253. Published 03 october 2017

     

Contact

Julie Gavard
Chercheuse CNRS au Centre de recherche en cancérologie Nantes-Angers (CNRS / Inserm / Université de Nantes / Université d'Angers)