Qui fait quoi dans la crise d’épilepsie-absence ?
Figure : a) A gauche : Schéma de la boucle thalamo-corticale (Cx : cortex, TC : noyaux thalamo-corticaux, NRT : noyau réticulé thalamique). A droite : Enregistrements simultanés de l’activité électrique de deux neurones thalamo-corticaux (TC) et d’un neur

Qui fait quoi dans la crise d’épilepsie-absence ?

Résultats scientifiques

L’épilepsie-absence est la forme la plus commune d’épilepsie pédiatrique. Une collaboration entre des chercheurs de l’UMR Neuroscience Paris Seine et de l’Université de Cardiff en Grande-Bretagne a permis de caractériser pour la première fois les activités hypersynchrones des réseaux neuronaux pendant les crises dans des modèles animaux. Ce travail a été publié le 16 avril 2018 dans le journal Nature Neuroscience qui lui consacre un éditorial « news and views ».

L’épilepsie-absence est une pathologie qui affecte 10 à 17% des enfants et adolescents épileptiques. Elle se manifeste par de brefs, mais très fréquents, épisodes d’altération de la conscience caractérisés par une rupture du contact, de la communication, et un arrêt de l’activité en cours. Ces manifestations comportementales sont associées, au niveau de l’électroencéphalogramme, à l’apparition d’un motif d’oscillation particulier, les décharges pointe-ondes. Au-delà des crises elles-mêmes, cette pathologie s’accompagne de difficultés d’apprentissage, de troubles du comportement et de problèmes psychiatriques.

Si l’origine de l’épilepsie-absence reste très mal connue, il est néanmoins démontré que des oscillations synchrones du système thalamo-cortical sous-tendent l’apparition des décharges pointe-ondes. Ce réseau thalamo-cortical est organisé en boucle : les neurones excitateurs corticaux et thalamo-corticaux sont réciproquement connectés et les neurones inhibiteurs thalamiques reçoivent des projections à la fois du cortex et des neurones thalamo-corticaux. Le rôle respectif de ces différents types neuronaux dans l’hyperexcitabilité de cette boucle est vivement débattu.

Dans le cadre d’un Laboratoire International Associé entre le CNRS et l’Université de Cardiff (Grande-Bretagne), les chercheurs ont pour la première fois enregistré simultanément l’activité de plusieurs neurones corticaux et thalamiques, excitateurs comme inhibiteurs, pendant les crises d’absence chez des animaux vigiles libres de leurs mouvements. Cette étude a été réalisée sur deux modèles rongeurs de crises d’épilepsie-absence, un modèle génétique et un modèle pharmacologique. Ils ont montré que l’activité des neurones thalamo-corticaux, qui constituent la sortie du thalamus vers le cortex, est contrôlée et synchronisée par la combinaison d’une excitation en provenance du cortex et d’une inhibition en provenance des neurones du noyau réticulé thalamique.  En revanche, contrairement à l’idée communément admise, les mécanismes d’excitabilité intrinsèques des neurones thalamo-corticaux contribuent fort peu à l’hyperexcitabilité de la boucle thalamo-corticale à l’origine des décharges pointe-onde.

Cette analyse de l’activité unitaire corticale et thalamique constitue la première description au niveau cellulaire de la dynamique du réseau thalamo-cortical pendant les crises d’absence chez des animaux vigiles. Elle permet de dépasser des controverses de la littérature, en particulier concernant les rôles respectifs des deux types de neurones thalamiques, excitateurs et inhibiteurs dans la génération des décharges pointe-ondes, et est fondamentale pour le futur développement de thérapies innovantes de cette pathologie de l’enfant particulièrement invalidante.

Image retirée.
Figure : a) A gauche : Schéma de la boucle thalamo-corticale (Cx : cortex, TC : noyaux thalamo-corticaux, NRT : noyau réticulé thalamique). A droite : Enregistrements simultanés de l’activité électrique de deux neurones thalamo-corticaux (TC) et d’un neurone du Noyau Réticulé du Thalamus (NRT) pendant les décharges pointe-ondes de l’EEG. b) A gauche : Coupe d’un cerveau de rat montrant l’emplacement des électrodes d’enregistrement et des applications locales de bloquants pharmacologiques (même code couleur que le graphe de droite). A droite : La modification de l’excitabilité des neurones du cortex et du NRT par l’application locale d’un bloquant des canaux calciques diminue les crises. Ce même bloquant n’a pas d’effet dans les noyaux thalamo-corticaux.
© Nathalie Leresche

 

En savoir plus

Contact

Nathalie Leresche
Neuroscience Paris Seine CNRS UMR 8246, Inserm U1130, Sorbonne Université UM119, Institut de Biologie Paris-Seine (IBPS)
Vincenzo Crunelli
Neuroscience Division, School of Bioscience, Cardiff University, Cardiff, UK Department of Physiology and Biochemistry, University of Malta, Malta