La rupture à grande vitesse du silicium monocristallin

Résultat scientifique Matériaux et structures

Le bris d’une glace ne laisse aucun doute, les matériaux fragiles éclatent à des vitesses fulgurantes et en des motifs complexes. Au-delà d’éviter sept ans de malheur, le phénomène intéresse de nombreux domaines, comme celui des cellules photovoltaïques. Des chercheurs du Laboratoire de mécanique des contacts et des structures ont ainsi étudié la rupture du silicium monocristallin, afin de mieux comprendre la vitesse et la morphologie des fissures. Ces travaux sont publiés dans la revue Nature Communications.

L’étude de la rupture constitue un challenge important en mécanique des matériaux. De nombreux effets à l’échelle atomique ou non linéaires empêchent d’interpréter le phénomène par la seule théorie de la rupture élastique linéaire. Des chercheurs du Laboratoire de mécanique des contacts et des structures (LaMCoS, CNRS/INSA Lyon) ont décidé de se focaliser sur le bris du silicium monocristallin. Avec ce matériau particulièrement pur, ils ont voulu vérifier un certain nombre d’observations faites par d’autres équipes.

Ils ont découvert que les fissures se propageaient extrêmement rapidement, pour atteindre jusqu’à 3700 mètres par seconde dans le plan (110) du cristal. Ce plafond correspond à 0,8 fois la vitesse de Rayleigh, c’est-à-dire celle des ondes de surface pour un monocristal de silicium. Des travaux précédents suggéraient cependant que, passé la moitié de la vitesse de Rayleigh, les fissures se propageaient en changeant de plan. Ce n’est ici pas le cas. Le front de fissure reste très propre et ne dévie pas : le phénomène était en fait dû à un biais des conditions expérimentales.

Les chercheurs ont également constaté que des ondes solitaires, c’est à dire des instabilités ordonnées en pointe de fissure, apparaissaient systématiquement à partir de 0,6 fois la vitesse de Rayleigh. Ces instabilités, ainsi que des mécanismes comme la vibration des atomes ou l’émission de phonons, contribuent à la dissipation d’une petite fraction de l’énergie de la fissure qui, justement, l’empêche d’atteindre la vitesse de Rayleigh. Ces travaux, liés au projet Equipex DURASOL, permettent de mieux connaître les propriétés du silicium monocristallin, très prisé dans le domaine photovoltaïque et en microélectronique, et des matériaux monocristallins fragiles en général. 

 

Image retirée.
Image retirée.
© LaMCoS
Le faciès de rupture à très grande vitesse (3600 m/s) présente des traces d’ondes solidaires, dites « crack front waves ». Les traces ont été observées par microscopie MEB et AFM. Les barres d’échelle font 10 µm, 10 µm et 5 µm.

 

Références :

Velocity correlated crack front and surface marks in single crystalline silicon,
L. Zhao, D. Bardel, A. Maynadier, D. Nelias 
Nature Communications. Article number: 1298 (2018)
DOI:10.1038/s41467-018-03642-w

Contact

Communication CNRS Ingénierie
Daniel Nelias
Chercheur