Quand la lumière est dirigée par son champ magnétique

Résultat scientifique Photonique

Dans sa description électromagnétique, la lumière est composée de deux ondes : une électrique et une magnétique. Alors que cette seconde partie se manifeste d’ordinaire extrêmement peu, des chercheurs de l’Institut Femto-ST ont découvert une nouvelle interaction magnétique optique. Ils s’en sont servis pour diriger des flux lumineux grâce à leur partie ondulatoire magnétique. Ces travaux sont publiés dans la revue Light : Science and Applications.


Malgré le lien entre les deux ondes coexistant au sein de la lumière, sa partie magnétique est souvent considérée comme un contributeur rare et négligeable à l’interaction entre la lumière et la matière. Avec l’avènement de la nano-optique et des métamatériaux, qui permettent des études à des dimensions inférieures aux longueurs d’onde du spectre visible, cette « face cachée » de la lumière dévoile des propriétés optiques totalement nouvelles. Des chercheurs de l’institut Femto-ST (CNRS/Université Technique Belfort-Montbéliard/Université de Franche-Comté/ENSMM) en ont révélé une nouvelle manifestation dirigeant des flux lumineux à très petite échelle grâce à leur champ magnétique optique.

Les chercheurs ont pour cela creusé une tranchée nanométrique à la surface d’un cristal photonique monodimensionnel, un empilement de fines couches diélectriques. Lorsque de la lumière y est projetée, il se forme des ondes lumineuses qui se propagent parallèlement à la surface diélectrique sans pouvoir la quitter : les ondes de surface de Bloch. Or, si l’onde incidente est polarisée circulairement à droite, les ondes de surface de Bloch se propagent vers la gauche de la tranchée, et inversement. Le phénomène est provoqué par l’interaction entre les moments angulaires de spin associés à la lumière incidente et aux ondes de surface de Bloch, tous deux portés par leurs champs magnétiques respectifs.

Ces travaux ouvrent de nouveaux degrés de liberté dans la manipulation de la lumière et la possibilité d’utiliser les ondes de surface de Bloch pour sonder localement la polarisation magnétique de la lumière. Elles permettraient alors de mesurer des grandeurs optiques encore inaccessibles, telles que la densité de spin magnétique optique.  
 

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© Femto-St
Schéma de principe de l’interaction spin orbite magnétique optique permettant le couplage directionnel de lumière à une onde de surface de Bloch. L’excitation des ondes de surface de Bloch (en rose sur la figure) est réalisée par une tranchée étroite creusée sur un empilement de fines couches diélectriques (cristal photonique 1D). Cette tranchée est illuminée par un faisceau polarisé en incidence rasante (faisceau en blanc avec une flèche rouge indiquant le sens de propagation de la lumière). Lorsque la polarisation incidente est circulaire gauche (sens horaire en jaune sur la figure), les ondes de surface sont lancée sélectivement à droite de la tranchée (sens de propagation noté par une flèche jaune). Lorsque la polarisation est circulaire droite (sens antihoraire en vert sur la figure), les ondes de surface sont lancées sélectivement à gauche de la tranchée (sens de propagation noté par une flèche verte). Nous avons démontré que c’est l’hélicité du champ magnétique optique au niveau de la tranchée (représentée en bleu clair) qui contrôle le flux des ondes optiques de surface distribué sur les deux côtés de la tranchée. 

Références :

Magnetic spin-orbit interaction of light,
Wang, H. Zhang, T. Kovalevitch, R. Salut, M-S. Kim, M-A. Suarez, M-P. Bernal, H-P. Herzig, H. Lu and T. Grosjean
Light: Science and Applications, 7, 24 (juin 2018)
https://www.nature.com/articles/s41377-018-0018-9

Contact

Communication CNRS Ingénierie
Thierry Grosjean
Chercheur