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Une nouvelle classe d'antidépresseurs est en cours de développement à l'Institut de pharmacologie moléculaire et cellulaire1. Des peptides courts efficaces, à faible dose, au bout de seulement quatre jours de traitement, au lieu de deux à trois semaines habituellement pour les antidépresseurs couramment utilisés.
Les médicaments antidépresseurs, apparus depuis une cinquantaine d'années, ont démontré leur efficacité pour lutter contre des troubles qui affectent une personne sur cinq dans le monde. Mais ils ne sont pas entièrement satisfaisants : ils n'agissent qu'au bout de deux à trois semaines de traitement, provoquent des effets secondaires tels que la fatigue, des maux de tête, des nausées, des tendances suicidaires.... et restent encore sans effet sur un patient sur trois. C'est pourquoi les chercheurs sont toujours en quête de nouvelles classes d'antidépresseurs, plus efficaces et moins contraignants. La spadine, un peptide d'origine naturelle, a été identifiée par l'Institut de pharmacologie moléculaire et cellulaire1 comme un antidépresseur qui permettrait de s'affranchir des inconvénients des médicaments actuels contre la dépression. Plusieurs molécules dérivées de la spadine ont été développées et brevetées, et les études visant à les valoriser sont en cours avec la start-up 3P3D2.
L'histoire commence en 2006, quand les chercheurs de l'Institut de pharmacologie moléculaire et cellulaire identifient un canal ionique présent dans la membrane des cellules neuronales, TREK-13, comme une cible potentielle pour les traitements contre la dépression: lorsque le canal TREK-1 est neutralisé chez la souris, l'animal devient résistant à la dépression. En 2010, l'équipe met au point une molécule capable de bloquer le canal TREK-1 : la spadine, un peptide de 17 acides aminés, dérivé d'une protéine naturelle (la sortiline).
Les études sur la spadine sont très encourageantes. En effet, son action se révèle beaucoup plus rapide que celle des antidépresseurs actuels : elle est efficace au bout de quatre jours de traitement. Les doses nécessaires sont plus faibles et elle n'a pas d'effets secondaires en cardiologie. Seule ombre au tableau : sa courte durée de vie dans l'organisme, 7 heures. En collaboration avec 3P3D, les chercheurs se sont alors mis en quête d'analogues de la spadine, des molécules proches qui auraient la même action tout en améliorant ses propriétés. Ils ont ainsi sélectionné une série de peptides plus courts que la spadine. "Nous avons identifié des "minispadines" qui ont plus d'affinité pour la cible, le canal TREK-1 (les doses nécessaires seront plus faibles), qui n'ont pas d'effets secondaires, et qui ont une durée de vie d'environ 24 heures, suffisantes pour un traitement", indique Marc Borsotto, chercheur à l'Institut de pharmacologie moléculaire et cellulaire dans l’équipe Neuropeptides, pathologies cérébrales et thérapeutiques dirigée par les Drs Catherine Heurteaux et Jean Mazella.
Des études précliniques de pharmacocinétique et de toxicité sont en cours avec 3P3D. En parallèle, les partenaires envisagent des discussions avec des laboratoires pharmaceutiques susceptibles de poursuivre le développement de ces nouveaux antidépresseurs, et notamment de mettre en place des essais cliniques de phases 1 et 2.
1 Institut de pharmacologie moléculaire et cellulaire (CNRS/Université Nice Sofia Antipolis)
2 3P3D (Public-private partnership for drug discovery and development) est une start-up créée par Serge Richard, PDG de Cerb, une société de recherche sous contrat qui réalise des essais précliniques en pharmacologie et toxicologie. Quatre brevets déposés par le CNRS et l'université de Nice Sophia-Antipolis ont été licenciés ou sont en cours de licenciement à la société 3P3D.
3 Le canal TREK-1 est une protéine membranaire qui laisse passer les ions potassium et qui régule ainsi l’excitabilité des neurones.
Contact :
Marc Borsotto / Institut de phamarcologie moléculaire et cellulaire / borsotto@ipmc.cnrs.fr