L’histoire
de l’avènement de l’inflation est édifiante.
Elle a démarré sur des bases incertaines, vers 1980,
et aboutit à l’hypothèse d’une expansion
démesurée de l’Univers. Aujourd’hui, ce
scénario est devenu un authentique chapitre du déroulement
du big bang. Au point que l’inflation est soupçonnée
de participer, en sous-main, à l’expansion accélérée
récente due à une mystérieuse énergie
noire.
Inflation, une solution
des problèmes du Big Bang
L’idée d’inflation est, certes, née des
propres insuffisances du big bang. En 1980, un problème clef
était celui de la grande unification des interactions forte
et électrofaible. Une solution semblait résider dans
des objets exotiques et massifs, jamais observés : les monopôles
magnétiques, de 0,00001 milligramme, 1016 fois
plus lourds qu’un proton. Ces superparticules reliques seraient
nées en nombre avec l’Univers. Et elles auraient dû
le rendre un million de milliards de fois plus dense. Le cosmos
n’y aurait pas survécu. Il se serait recontracté
en "big crunch". L’inflation est arrivée,
à cette époque, comme une rustine. Elle a sauvé
de justesse l’espace-temps.
Cependant, les problèmes subsistaient. Parmi ceux-ci, la
planéité de la géométrie de l’espace.
Comment l’expliquer ? A priori, selon la relativité,
l’Univers devrait être plutôt courbe et non aussi
plat. D’autre part, l’homogénéité
à grande échelle est un autre motif d’étonnement.
Les observations, en ondes radio, du fond de rayonnement fossile
ont montré que l’Univers est assez uniforme. Ceci y
compris pour des régions éloignées qui n’ont
pas eu le temps de communiquer à la vitesse de la lumière.
Dès lors, comment expliquer leurs similitudes ? C’est
le problème de l’horizon. Enfin, l’Univers primordial
comportait quand même de petits grumeaux de matière.
Ils ont donné lieu à la formation des galaxies. La
distribution de leur densité correspond à ce qu’auraient
engendré les fluctuations quantiques primordiales de l’inflation.
Que dire de cette coïncidence ? Profonde ou fortuite ?
L'iinflation résout naturellement ces questions. Lors du big
bang, les particules primordiales n’avaient pas encore de
masse. Elles obéissaient à la gravité, aux
interactions fortes et électrofaibles, ainsi qu’à
une nouvelle entité influente. On l’appelle inflaton,
«faux vide» ou «antigravité». Il
envahit l’espace avec une énergie qui entraîne
la recrudescence de l’expansion. Ceci dure tant que l’Univers
n’est pas retombé vers plus de stabilité et
n’a pas évacué son surplus de bouillonnement.
L’inflation accélérée se produit à
une vitesse supérieure à celle de la lumière.
Le phénomène est «autoentretenu». Car,
contrairement à la matière qui se dilue à vive
allure, l’inflaton se crée avec l’espace. Plus
l’Univers s’étend, plus il assoit sa puissance.
Ainsi s’expliquerait la fameuse platitude de l’Univers.
Comme des moustiques à la surface d’un grand ballon
gonflé, nous sommes incapables d’étendre notre
champ de vision au-delà d’un certain horizon. De même,
par un effet similaire, les hétérogénéités
de la matière (ainsi que les monopôles) ont dû
être gommés par l’expansion. Une propriété
du vide inflationnaire est de produire des fluctuations de toutes
tailles et d’égale intensité.
L’explosion de la vie
et de l’énergie noire
L’Univers empli de vide quantique apparaît agité
de fluctuations irrépressibles. Certaines, au hasard, favorisent
de petits domaines que l’inflation, à son tour, étendra
au-delà du raisonnable. C’est le scénario moderne
de l’inflation chaotique. Il est défendu par Andreï
Linde. De nouveaux univers-bulles explosent à des endroits
aléatoires, et ainsi de suite. Le phénomène
- extraordinairement créatif - se reproduit identique
à lui-même de toute éternité. Cette richesse
autoriserait d’autres univers, séparés du nôtre.
Ces mondes exhiberaient d’autres propriétés :
lois physiques, constantes fondamentales, vitesse de la lumière
et, peut-être, dimensions supplémentaires de l’espace…
Au bout du compte, la seule particularité de notre petit
recoin de cosmos serait d’abriter une fragile forme de vie
qui se dit intelligence. Bel enseignement. Fort de ces premiers
succès, les spécialistes s’attachent à
présent à établir des ponts avec d’autres
branches porteuses de l’astrophysique et à tenter d’autres
fructueuses prédictions. Notamment, ils se concentrent sur
une période d’expansion accélérée
plus récente et tangible. Elle sévit depuis quelques
milliards d’années et a été révélée
par les observations d’explosions de supernovae lointaines.
Elle serait mue par une énergie noire mal identifiée.
Le réveil de l’inflaton ?
Pour en savoir plus
Une nouvelle
lumière sur l'énergie sombre - Communiqué de
presse CNRS/INSU du 30 janvier 2008
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