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Urbanisation, contamination et biodiversité des sols
L'artificialisation des sols français
La perte de la biodiversité des sols est en premier lieu causée par leur disparition. Les sols artificiels - autrement dit urbanisés - représentaient en 2004 8,4% du territoire métropolitain avec une progression de 15% par an depuis 1994, alors que dans la même période l'augmentation de la population française n'était que de 5% par an. D'après l'Ifen (Institut français de l'environnement), cette progression provient d'une construction croissante de maisons individuelles et des infrastructures associées (jardins, parkings, transports) qui grignotent du terrain.
Ces terres perdues représentent une perte de la biodiversité car les plantes ne peuvent plus s'y développer (à l'exception des parcs et jardins accueillant une flore hautement sélectionnée par l'être humain). Par ailleurs, la flore bactérienne et la faune du sol pâtissent inévitablement de la construction en surface de structures imperméables à la lumière et à l'eau telles que le béton ou l'asphalte.© IRD Photothèque / Montoroi, Jean-Pierre
Rédaction :
Renan Aufray, chargé de mission à la FRB
Validation scientifique :
Antonio Bispo (Coordinateur du programme ADEME «Bioindicateurs de qualité des sols») et Laurent Charasse (chargé de mission « Enseignement agricole et biodiversité » - FRB)
Source :
IFEN, 2006. L'environnement en France - Les synthèses. La Documentation française.
La contamination des sols
La contamination des sols par une forte concentration en métaux lourds (cuivre, zinc, nickel, mercure, cadmium, etc.) et des micropolluants organiques (pesticides, etc.) diminue la biodiversité du milieu et entraîne généralement la sélection de populations résistantes aux pollutions.
L'apparition de résistances - notamment aux pesticides - pose un véritable problème de gestion des espèces dites nuisibles, ce qui pousse généralement au renforcement de la lutte par le biais de produits plus actifs et souvent plus polluants. Cette escalade dans la toxicité des produits utilisés vient perturber le métabolisme des espèces les plus sensibles et diminuer leur capacité de survie et de reproduction. Ainsi, des modifications drastiques de populations sont généralement observées lors de contaminations ponctuelles (sur des sites industriels par exemple) ou diffuses (contamination liée à des dépôts atmosphériques ou à des épandages de déchets).
Impact des métaux lourds sur les organismes du sol
Les éléments minéraux sont présents naturellement dans les sols, parfois à des concentrations très importantes (héritées des roches mères). Alors que certains éléments traces (communément appelés métaux lourds) sont nécessaires à la vie du sol (ex : cuivre, zinc), d'autres sont toxiques (ex : mercure et cadmium). Mais attention, pour tous ces éléments traces, de trop grandes quantités dans les sols engendrent des risques d'intoxication !
Les métaux lourds sont des produits polluants dont les processus de disparition naturels sont longs (transfert vers les horizons profonds, vers les eaux, absorption par les végétaux). L'accumulation de métaux lourds dans l'organisme d'un être vivant provoque des maladies pouvant être mortelles. C'est par exemple le cas du saturnisme provoqué par une accumulation de plomb dans les tissus.
Les plantes et les animaux absorbent les éléments traces présents dans les sols et les accumulent dans leurs tissus : les scientifiques parlent de bioaccumulation. L'absorption de quantités trop importantes par les organismes peut entraîner des perturbations dans leur métabolisme (cela peut par exemple ralentir la croissance des plantes). De plus, cette accumulation s'avère parfois dangereuse non seulement pour l'organisme qui ingère des métaux lourds, mais aussi pour ses consommateurs.
La présence de métaux lourds dans le sol, à des concentrations excessives, a donc un impact sur l'ensemble de la chaîne alimentaire, c'est-à-dire sur l'ensemble de la biodiversité, dont l'espèce humaine.© IRD Photothèque / Munzinger, Jérôme
© Inra / Opie 2001
Illustration : effet sur l'activité de la biodiversité du sol d'une litière polluée
Une étude menée dans le Nord de la France s'est intéressée à une pelouse fortement contaminée par du plomb, du cadmium et du zinc. Cette zone présente une accumulation anormale et non justifiée de litière (débris de végétaux, etc.). Les chercheurs ont constaté que l'activité des microorganismes du sol à cet endroit reste comparable à celle des sols non pollués, mais que certains maillons de la mésofaune - tels que les collemboles - sont absents. Les résidus végétaux ne sont alors plus fragmentés aussi finement que dans un site non pollué et l'action des microorganismes est ralentie.
Cet exemple illustre que la présence de métaux lourds dans le sol provoque des changements dans la structure de la biodiversité par l'élimination de certains groupes, la sélection d'individus d'autres groupes et même la croissance d'autres groupes. La conséquence de tout ceci est la mise en place d'un nouvel écosystème globalement plus pauvre en biodiversité.© Droits réservés, Gis Sol
Rédaction :
Renan Aufray (chargé de mission à la FRB) et Manuelle Rovillé (chargée de mission à la FRB)
Validation scientifique :
Antonio Bispo (Coordinateur du programme ADEME «Bioindicateurs de qualité des sols») et Laurent Charasse (chargé de mission « Enseignement agricole et biodiversité » - FRB)