

Les forces de production de la variabilité génétique
La mutation
Dans l'absolu, c'est essentiellement la mutation qui produit de la variabilité génétique. C'est surtout à l'occasion des différentes divisions cellulaires pendant lesquelles les brins d'ADN sont soumis à certaines tensions que des cassures se produisent. Parfois la réparation se fait mal. On aboutit à une translocation quand le fragment cassé est recollé ailleurs, ou à une inversion quand le fragment est recollé au même endroit, mais à l'envers. Ces fragments sont de taille extrêmement variable. Parfois des changements ponctuels sont suffisants pour modifier la lecture du code génétique et perturber sa traduction en protéines. Ces accidents peuvent se produire dans les parties codantes des gènes, les exons, ou dans les parties non codantes. On ignore alors le plus souvent les effets que ces mutations sont susceptibles d'entraîner. Certaines ne sont suivies d'aucun effet apparent, on les dit silencieuses. D'autres modifient la nature de la protéine codée par le gène, d'autres uniquement sa quantité dans certaines circonstances.
Le plus souvent ces modifications aléatoires ne sont pas viables, mais elles sont masquées par l'expression correcte de leur gène homologue (dominance). Tant que q leur fréquence est faible, de telles mutations non viables pourront être conservées car q² leur probabilité d'apparition à l'état homozygote délétère demeure très faible. Cette accumulation de gènes défectueux dans une population est ce qu'on appelle parfois son "fardeau génétique".
C'est la sélection qui, en éliminant de la reproduction les homozygotes défectueux, maintient ce type d'allèles à une fréquence basse, celle de l'équilibre mutation/sélection.
D'autre part, il faut remarquer que certains gènes très longs ont plus de chance de muter que d'autres, de même que ceux qui sont placés dans les zones fragiles du chromosome.© CNRS Photothèque/RAGUET Hubert© CNRS Photothèque/VIALA Françoise
Evaluation de la variabilité génétique produite par mutation
Si l'on admet un taux de mutation moyen de 10-6 par gène et par génération, sachant qu'un mammifère est porteur de l'ordre de 20 000 gènes, 2% des individus à chaque génération seront porteurs d'une nouvelle mutation dans les gènes exprimés et probablement 30% seront porteurs d'une mutation sur l'ensemble de leur génome.
La duplication
La duplication est une forme particulière de mutation où le même gène est répété plusieurs fois. Elle constitue une forme de résistance très utile contre les aléas des mutations, en même temps qu'elle permet la diversification de la fonction dévolue à ce gène.
La diversité des associations des allèles
La diversité génétique ne se limite pas à la diversité des allèles, il faut aussi prendre en compte la diversité de leurs associations.
A chaque génération, sélection et accouplements vont privilégier certaines associations de gènes au détriment d'autres. Ces associations seront défaites par moitié à la génération suivante si elles concernent des gènes indépendants. En revanche, elles se maintiendront de façon d'autant plus stable que le taux de recombinaison entre les deux gènes sera plus faible. On voit ainsi que par le jeu de facteurs qui privilégient certaines combinaisons d'allèles, leur association physique sur un même chromosome aura tendance à pérenniser l'association, cela d'autant plus que le taux de recombinaison des deux loci sera faible. Des "super-gènes" (appelés aussi haplotypes) vont ainsi se constituer, où les forces agissant par la sélection et les accouplements remplacent, ou du moins rajoutent, une strate à la création de variabilité génétique par la mutation.© CNRS Photothèque/BOYER Roland
La migration
Enfin, au niveau de la sous-population, la migration à défaut de créer de la variabilité génétique permet son maintien. En effet, une sous-population est très rarement totalement isolée. Elle reçoit donc des apports venant d'autres sous-populations, qui entretiennent sa variabilité.© CNRS Photothèque/TABERLET Pierre
Rédaction :
Bertrand Langlois, directeur de recherches à l'INRA, Centre de recherches de Jouy-en-Josas, Station de génétique quantitative et appliquée.