

De l'antiquité à aujourd'hui : l'épopée de quelques médicaments
Antiquité (6e siècle avant J.-C. - 5e siècle après J.-C.)
2000 ans avant J.-C. :
Premiers écrits chinois sur les plantes médicinales : 2000 à 2500 drogues sont déjà décrites (sur les 6000 à 6500 actuellement utilisées par la médecine chinoise).
1600 ans avant J.-C. :
Premières traces d'utilisation de drogues d'origine végétale pour la préparation des médicaments : Mésopotamie, Egypte, avec l'invention de l'écriture (papyrus Ebers : ancien traité médical d'Egypte antique) et des peintures
650 ans avant J.-C. :
Tablettes d'argile sur lesquelles le roi Assurbanipal avait fait recopier les utilisations traditionnelles des populations sumériennes et babyloniennes mentionnant le séné, la mandragore, la digitale, le pavot…
Crête :
Premier témoignage de l'utilisation des plantes méditerranéennes avec la présence de pavots sur des sculptures en Crête. L'opium est la base de la thériaque, produit très utilisé en Grèce contre la douleur en raison de la présence de morphine. Il sera repris par les pays arabes et l'Inde aux 8e et 10e siècles.
Théophraste (372 - 287 ans avant J.-C.) :
Premier chercheur qui pose les fondements de la botanique, de la médecine et de la pharmacie. Première classification des plantes médicinales selon leurs usages dans le " Traité des plantes ".
1er siècle après J.-C. :
Dioscoride, médecin grec et pharmacien des légions romaines : rédige le traité antique " De materia medica " sur l'utilisation des drogues animales et végétales, qui décrit et illustre environ 800 " drogues ".
Déclin de l'empire romain :
Le traité de Dioscoride passe dans la tradition arabe et devient le " Manuscrit de Bagdad ".
Moyen Age (du 5e au 15e siècle)
Entre 1240 et 1248 :
Ibn al Baytar, grand botaniste et pharmacologue, rédige le " Traité des simples ". Cet ouvrage de référence sur la pharmacopée arabo-persanne du 13e siècle représente une grande avancée dans ce domaine. Le nombre de drogues décrites, d'origine végétale, animale ou minérale, passe de 800 à 1500.
Renaissance en Europe (du 15e au 17e siècle)
Cette période voit le développement des échanges commerciaux, l'élargissement de la connaissance des espèces médicinales et un plus grand nombre de descriptions de drogues disponibles.
1578 :
Li Shi-zhen, grand physicien et pharmacologue chinois, publie sous la dynastie Ming l'ouvrage " le Compendium de matière médicale (Bencao Gangmu) ". Cette grande encyclopédie de la nature, traitant de la géologie, la zoologie, la botanique et de substances diverses, contient plus de 11000 prescriptions.
Fin du 18e siècle : la botanique devient une science à part entière
Linné précise et normalise l'identification, la distinction et la classification des plantes.
Lavoisier, en développant la chimie, donne aux pharmaciens la possibilité d’extraire les principes actifs issus des plantes et de les définir chimiquement.
19e et 20e siècles : toutes les plantes actives sont passées en revue
1805 :
Extraction du premier principe actif issus des plantes : expérience menée sur le pavot à opium, d'où on isolera la morphine (Friedrich Wilhelm Sertürner).
© IRD Photothèque / Boulvert, Yves
1820 :
Pelletier et Caventou, pharmaciens français, isolent la quinine (un alcaloïde) des quinquinas (arbustes d'Amérique du Sud), pour lutter contre le paludisme.
1828 - 1897 :
Le pharmacien français Leroux isole la salicine, obtenue à partir de l'écorce de saule blanc. Le chimiste napolitain Piria préparera l'acide salicylique en 1838, qui sera synthétisé industriellement entre 1860 et 1874. En 1897, Félix Hoffman met au point la synthèse de l'acide acétylsalicylique qui deviendra l'aspirine.
1865-1870 :
Isolement de la cocaïne à partir des feuilles de coca (cocaïer)
© IRD Photothèque / Dejoux, Claude
1900-1940 :
Ernest Fourneau dissocie les différentes activités de la cocaïne (anesthésiante et action sur le psychisme) pour aboutir à une famille de molécules à effet anesthésique local, dont la stovaïne. Suivront la lidocaïne, la xylocaïne.
© CNRS Photothèque / GUENARD Daniel
1928 :
Découverte du premier antibiotique, la pénicilline, issu de la moisissure penicillium par l'Ecossais Alexander Fleming
Droits réservés. CNRS
1958-1965 :
Isolement de la vinblastine et de la vincristine à partir de la pervenche de Madagascar, deux anticancéreux.
© CNRS Photothèque / BOURGEOIS Caroline
1966 :
Isolement de la camptothécine à partir d'un arbre chinois, Camptotheca acuminata, pour lutter contre le cancer.
1967 :
Isolement du Taxol® à partir de l'if du Pacifique pour lutter contre le cancer. Détermination de son mécanisme d'action en 1979.
1972 :
Isolement de l'artémisinine ou qing-hao su à partir d'une plante chinoise, Artemisia annua ou qing-hao, pour lutter contre le paludisme.
1979 :
Synthèse de la vinblastine et la vincristine, puis de la Navelbine® et la vinflumine à partir de la pervenche de Madagascar (Catharanthus roseus), pour lutter contre le cancer.
1984 - 1991 :
Synthèse du Taxotère® à partir du Taxol® (if d'Europe), pour lutter contre le cancer. Application clinique du Taxol® aux Etats-Unis en 1988, et du Taxotère® en France, à partir de 1991
1985 - fin des années 1990 :
Mise en évidence du mécanisme d'action de la camptothécine, et synthèse de l'irinotécan et du topotécan, et introduction de ces molécules en thérapeutique pour traiter des cancers du côlon, de l'ovaire et du sein.
De plus, il n'y a pas que l'espèce humaine qui sait se soigner avec les ressources naturelles : les grands singes aussi ! La transmission est d'ailleurs culturelle et les bébés singes apprennent à reconnaître ce qui est bon pour eux ou pas…
© IRD Photothèque / Peeters, Martine
Rédaction :
Manuelle Rovillé
Validation scientifique :
Serge Morand (Directeur de recherche à l’Institut des sciences de l’évolution de Montpellier – Université Montpellier 2)