Les recherches actuelles

    L'écologie évolutive  

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Thierry BOULINIER
UMR CNRS 7625,
Fonctionnement et évolution des systèmes écologiques
Université Pierre et Marie Curie, Paris

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
 
 
 
 
 
 
 
 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 
 

 





La biologie évolutive et l’écologie partagent les mêmes objectifs qui sont de décrire la variation que l’on peut observer dans les systèmes naturels et de comprendre les mécanismes qui sont à l’origine de cette variation.


L'ECOLOGIE EVOLUTIVE ET L'EVOLUTION


Dans le cadre de ce questionnement, les biologistes évolutifs considèrent tout particulièrement les processus historiques dépendant des lignées évolutives, ce qui les amène souvent à inclure des reconstructions phylogénétiques et des modèles génétiques dans leurs analyses.
Les écologues, bien que conscients de l’importance des processus historiques, ont tendance à tenter d’expliquer la variabilité observée par des effets environnementaux actuels, ces effets pouvant être biotiques et abiotiques. L’écologie évolutive s’étend dans le champ de ces deux disciplines et incorpore l’ensemble des techniques et approches utilisées dans les deux. Les écologues évolutifs considèrent donc à la fois les influences historiques et contemporaines sur les patrons de variabilité observés et étudient cette variation à tous les niveaux, de l’individu (par exemple par l’étude du comportement ou du développement du phénotype) jusqu’aux communautés d’espèces ou grands groupes taxonomiques.

L'écologie évolutive incorpore directement les résultats des travaux conduits sur la génétique des populations et sur les mécanismes de la sélection naturelle. C’est avec les avancées récentes en génétique moléculaire, informatique et modélisation (qui ont notamment fourni des outils performants pour les analyses statistiques en génétique quantitative et en biologie comparative) que les écologues évolutifs ont pu intégrer d’une façon plus explicite les processus liés aux relations de descendance et les contraintes évolutives dans leurs programmes de recherche.

L’écologie évolutive moderne s’attache donc à considérer à la fois la valeur adaptative des traits et leur capacité à évoluer, et ne se limite plus seulement à tester des hypothèses adaptatives simples sans prendre en compte les contingences historiques. Le recours à l’approche expérimentale permet de plus de confirmer certaines des relations de cause à effet supposées. L’écologie évolutive s’appuie aussi de façon très significative sur une modélisation théorique des problèmes.


EXEMPLES DU TYPE DE QUESTIONS ABORDEES EN ECOLOGIE EVOLUTIVE


UN EXEMPLE D'APPORT DE L'ECOLOGIE EVOLUTIVE


Cet exemple consistera en la compréhension de l’évolution de la virulence dans les interactions hôte-parasite.
Un parasite est un organisme qui vit aux dépens d’un autre organisme, l’hôte, sans nécessairement le tuer. Comme les parasites dépendent de leurs hôtes, il pourrait paraître logique que les premiers soient sélectionnés pour avoir un effet bénin sur les seconds, jusqu’à devenir commensaux ou même mutualistes. Cette façon de raisonner correspondait à l’approche conventionnelle de la communauté médicale jusqu’à une époque très récente (Ewald 1994).

Les travaux théoriques modernes sur l’évolution de la virulence ont montré que cette approche conventionnelle était incorrecte. La sélection naturelle n’opère pas selon le principe de favoriser ce qui serait bien à long terme pour la population, mais par élimination des génotypes les moins ajustés aux conditions actuelles.
Les individus parasites ayant la plus forte probabilité de se propager à la génération suivante (par une transmission efficace à d’autres hôtes) devraient être favorisés, indépendamment des effets à plus long terme sur l’hôte. L’évolution de la virulence va donc pouvoir être directement influencée non pas seulement par la survie de l’hôte, mais aussi par des facteurs affectant la transmission (comme souvent la densité en hôtes sensibles).
Par ailleurs, même si cela bénéficiait plus (en termes absolus) aux différentes souches de parasites de se reproduire lentement dans l'hôte, la compétition entre les souches, pour être transmises plus efficacement, va entraîner la sélection de stratégies évolutivement stables qui ne seront pas nécessairement celles qui auraient été les plus optimales si il n'y avait pas de compétition entre les souches (application de la théorie des jeux à ce type de question).
La structuration spatiale des interactions, et notamment les taux relatifs de dispersion des hôtes et des parasites, vont aussi devoir être pris en compte.

C'est donc dans le cadre de l'écologie évolutive que ces avancées récentes dans la compréhension de l'évolution de la virulence ont été réalisées. Ces questions, tout comme de nombreuses autres, représentent des champs d'investigation très actifs actuellement en écologie évolutive.

LES GRANDS AXES DE L'ECOLOGIE EVOLUTIVE
Les travaux en écologie évolutive sont principalement menés dans le cadre des quatre grands axes suivants, au sein desquels des thèmes particuliers peuvent être identifiés :

L’évolution des traits d’histoire de vie
L’âge et la taille à maturité
Le nombre et la taille des descendants
L’évolution de la sénescence
Le sexe ratio et allocation dans la progéniture
Les individus spécialistes et généralistes
La dispersion des individus

L’écologie du comportement
Les systèmes d’appariement
La sélection sexuelle
La coopération et l'altruisme
Les stratégies d’approvisionnement alimentaire
Le choix de l’habitat de reproduction et la dispersion des individus

Les interactions entre espèces
Les espèces proches et le déplacement de traits écologiques
Les interactions prédateurs-proies
Les interactions hôtes-parasites
Les interactions entre plantes et herbivores
Les mutualismes
La dynamique géographique de la coévolution

Les adaptations aux changements de l’environnement dus à l’homme
Les changements globaux et la dynamique de la biodiversité
Les relations entre écologie évolutive et biologie de la conservation
L’écologie et l’épidémiologie des maladies infectieuses
La résistance aux pesticides et aux agents anti-infectieux
La prédiction des résultats et des implications de la lutte biologique
L’écologie et l’évolution des organismes génétiquement modifiés


LE FUTUR DE L'ECOLOGIE EVOLUTIVE
Domaine de recherche naturellement pluri-disciplinaire, l’écologie évolutive continue son développement par la poursuite de l’intégration de différentes approches au sein de la discipline (génétique moléculaire, statistique comparative, expérimentation en milieu naturel, modélisation…), mais aussi par des avancées dans la direction de questions se posant dans d’autres domaines tels que l’immunologie, la physiologie, la médecine, les neurosciences, la biologie du développement, la génomique, la bio-informatique…

L’écologie évolutive, par son approche intégrée des interactions entre les gènes, les individus, les populations et l’environnement, devrait continuer d’apporter des éléments clefs pour une meilleure compréhension de l’importance des processus à l’origine des patrons de variabilité observés à différents niveaux dans les systèmes biologiques, et donc permettre une meilleure approche de la gestion de la biodiversité.


BIBLIOGRAPHIE


 
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