VII.3.2 Aires marines protégées (AMP) Comparé à ce qui s’est pratiqué en domaine continental, la protection de secteurs marins a une histoire récente. La toute première réserve a été promulguée en 1960 dans les Keys au sud de la Floride ; à comparer à la création du parc du Yellowstone en 1872. Les aires marines protégées (AMP) qu’elles soient multi-usages ou des réserves intégrales sont à la fois un outil de gestion pertinent pour atténuer certains des effets négatifs des activités humaines sur les écosystèmes et un laboratoire pour le développement de recherches sur l’adaptabilité, la résilience et la connectivité. La Conférence des parties à la convention sur la diversité biologique (COP 10) s’était fixée comme objectif de constituer un réseau d’AMP couvrant 10% des océans d’ici 2012 et 20% d’ici 2020. La loi 2009/967 dite Grenelle I reprend cet objectif de création d’AMP (y incluses les zones marines du réseau Natura 2000 de l’Union Européenne et la création de parcs naturels marins) à hauteur de 10% des eaux placés sous sa souveraineté dans les limites de sa mer territoriale en 2012 en métropole et en 2015 dans les DOM et 20% en 2020 (dont la moitié en réserves de pêche). Depuis la création du parc naturel marin d’Iroise en 2007, d’autres parcs naturels marins viennent de voir le jour (Mayotte en 2010, Golfe du Lion en 2011, Les Glorieuses en 2012) et quatre sont en études (estuaires picards mer d’Opale, Gironde et Pertuis, golfe normand-breton, bassin d’Arcachon). En 2009, le rapport d’évaluation de la Commission européenne sur la mise en oeuvre de la directive 92/43/CE concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et flore sauvages reste préoccupant concernant les connaissances relatives aux quatre régions biogéographiques marines européennes. De tels constats imposent un renforcement de la production et de la collecte harmonisées des connaissances dans ces régions. La recherche montre clairement que les AMP effectivement protégées sont capables d’augmenter les densités, tailles et biomasses des espèces commerciales et les richesses taxonomiques et fonctionnelles des communautés non seulement dans la réserve, mais aussi bien au delà de la zone effectivement couverte par l’AMP. Les toutes dernières avancées de la recherche ont permis de confirmer les théories selon lesquelles l’efficacité des AMP était fonction de différents facteurs comme leur âge, leur taille, ou le niveau de surveillance et de coercition dont elles sont l’objet. Par exemple, même si les nouvelles et petites AMP peuvent être efficaces, les grandes et anciennes le sont d’autant plus. Dans le même temps, aucun effet ne doit être attendu si les dispositifs réglementant les AMP ne sont pas respectés par les usagers et si elles ne disposent pas d’organisme de gestion. En plus de ces facteurs directs, il est maintenant reconnu que la temporalité de la réponse à la protection est aussi fonction de nombreuses cascades trophiques au sein même des AMP, impliquant de complexes relations prédateurs-proies. Le potentiel socio-économique des AMP et leurs implications pour les populations locales deviennent également plus clairs qu’auparavant. Des études montrent, par exemple, que les AMP peuvent conduire à la création d’emplois et/ou à l’augmentation des revenus liés à la pêche et au tourisme. Elles peuvent également conduire au maintien d’activités traditionnelles. Ces résultats sont encourageants mais de nombreuses questions restent encore sans réponses et nécessitent des efforts de recherche. Quelle science faut-il développer pour déployer et maintenir un réseau d’AMP qui soit efficace en terme de préservation des habitats et des ressources ? Des questions simples en apparence peuvent s’avérer très compliquées à résoudre. Par exemple, pour des organismes soumis à des pressions de pêche comme les poissons, quel pourcentage est-il nécessaire de préserver pour assurer le maintien de la ressource ? Comment concilier les impératifs de protection des compartiments benthiques et pélagiques ? Comment évaluer les impacts économiques, sociaux ou culturels d’une AMP, quels types de coûts prendre en compte ? Plus généralement, optimiser l’architecture des réseaux d’aires marines protégées et les instruments de leur gestion suppose une connaissance approfondie des habitats et de leur rôle fonctionnel, des zones-clés (e.g. frayères), des populations de nombreuses espèces (qu’elles soient considérées du point de vue fonctionnel, patrimonial, ou comme une ressource exploitée), des mécanismes de transport et de diffusion des larves ou de migration des adultes, du fonctionnement 135
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