prospective mer 150 car à l’image des forêts, les récifs coralliens font face à des régressions dramatiques au point que l’on évalue à près de 25% les récifs coralliens qui ont déjà disparus au cours des 20 dernières années et que près de 50% sont aujourd’hui en situation critique. Dans ce contexte, la recherche porte la responsabilité de poser les bons diagnostics et d’aider à choisir les options appropriées, tant pour les récifs eux-mêmes que pour les populations avoisinantes. On doit aller vers une meilleure intégration de la complexité des systèmes coralliens, une meilleure appréhension des processus de persistance des populations et des peuplements et une meilleure compréhension des mécanismes de résistance aux stress. Trois niveaux d’approche doivent être simultanément abordés : le corail lui-même, l’écosystème corallien et les anthroposystèmes associés. • Le corail, dont le développement est basé sur une symbiose avec une algue unicellulaire, la zooxanthelle, est l’image même de la complexité de l’écosystème corallien. Cette symbiose a été l’objet, depuis presque 20 ans, de nombreux travaux visant à mieux comprendre son fonctionnement et notamment la contribution énergétique des zooxanthelles. Le blanchissement des coraux, événement spectaculaire bien souvent mis sous les projecteurs médiatiques, est issu d’une rupture de la symbiose, le corail expulsant ou digérant les zooxanthelles, en situation de stress. La mise en évidence dans les années 80 de nombreux clades de zooxanthelles dont la diversité pourrait être un moteur de la capacité d’adaptation du corail aux stress locaux, oriente désormais les recherches sur la base moléculaire de l’expression génique et de sa variabilité face aux différents types de stress, que ce soit des stress globaux, tels que l’augmentation de la température ou l’acidification des océans, ou des stress plus locaux tels que l’apport excessif de sédiments par les rivières. L’étude des mécanismes cellulaires et moléculaires entraînant la rupture de la symbiose est le point focal de nombreuses recherches renforcées par le développement de la génomique et des possibilités de séquençage haut-débit. • A l’échelle de la ceinture intertropicale, l’écosystème corallien est caractérisé par sa grande fragmentation : exacerbée dans les milieux insulaires du Pacifique, de l’Indien ou des Caraïbes ; bien réelle dans le contexte de continuum côtier de la grande barrière australienne du fait de la géomorphologie même des côtes, mais aussi des limites halines des coraux. Cette fragmentation, synonyme de fragilité dans tout écosystème, est l’objet de nombreux travaux sur la connectivité dans les récifs coralliens. Ces recherches ont permis des avancées significatives et elles ont irrigué d’autres contextes et d’autres modèles marins en démontrant que l’existence de stades larvaires pélagiques ne garantissait pas une vaste dispersion. • Les anthroposystèmes coralliens sont présents dans plus de 100 pays et concernent plusieurs centaines de millions d’habitants pour lesquels ils revêtent souvent une importance socio-économique considérable. Les interactions entre récifs coralliens et populations humaines sont extrêmement diverses selon les contextes récifaux, eux mêmes très variés, et les usages encore plus divers qu’en font les populations. Cette multitude de situations constitue une palette de cas qui offre un champ d’étude unique. Les travaux sur les récifs coralliens doivent s’appuyer sur des approches globales qui auront, à n’en pas douter, des conséquences sur les politiques futures. Dans le cadre de la conservation de la biodiversité et des services écosystémiques, une approche intégrative, associant tous les champs disciplinaires, pourrait s’appuyer sur cette diversité de contextes ; on peut citer les très grandes aires marines protégées de la Grande Barrière australienne, de Nouvelle Calédonie, ou encore des Kiribati, des Hawaii ou des Chagos. Il s’agit d’exemples uniques qui proposent des modes de gestion associant les concepts d’usage et de connaissances traditionnelles à l’évaluation des services écosystémiques et la perspective de reconnaissance des bonnes pratiques au travers de fonds fiduciaires pour la conservation. La mise en place de dispositifs et d’actions d’observation, de modélisation et d’expérimentation spécifiques, faisant interagir dans l’analyse les différents éléments de ces socio-écosystèmes est l’un des enjeux majeurs de la recherche en ce domaine. L’effort de recherche à accomplir devra en priorité répondre à des interrogations sur : l les processus physiologiques, cellulaires et moléculaires impliqués dans les résistances aux stress (climatiques et locaux) des coraux et dans la faillite de cette résistance aboutissant au blanchissement ; l les perspectives en biologie et politique de conservation pour les systèmes coralliens, que ce soit à partir de travaux sur la biodiversité, la connectivité, ou des approches globales intégrant l’Homme.
prospectivemer2013
To see the actual publication please follow the link above