prospective mer 66 Focus - La connectivité en milieu marin : un carrefour disciplinaire (suite) Si la connectivité en milieu marin est un enjeu de recherche pour des disciplines aussi diverses que la biologie, l’océanographie, en passant par les sciences humaines et sociales, c’est que le milieu marin a longtemps été perçu comme un milieu particulièrement diffusif. Cette perception repose sur l’existence de multiples supports pour la dispersion des organismes, par exemple via les grands courants océaniques, et le fait que la plupart des espèces marines passent par une phase dispersive (e.g. en tant qu’adulte pour les organismes pélagiques, larves, spores ou gamètes pour les organismes à cycle bentho-pélagique ; voir la figure V.3 dans ce même chapitre). Mais dans la dernière décennie, ce paradigme d’un milieu diffusif a été largement remis en question par les différentes communautés scientifiques. Par exemple, les études de systématique, biogéographie et de phylogéographie ont montré que les espèces supposées cosmopolites étaient souvent composées d’un ensemble d’espèces cryptiques. Par ailleurs, les modèles biophysiques de circulation de propagules (Figure V.7) ont mis en évidence que des formations hydrodynamiques pouvaient être à l’origine de zones de rétention efficaces limitant la dispersion de larves même à longue durée de vie. Quant aux analyses de génétique des populations, elles ont dans quelques cas pu montrer que les nouvelles recrues d’espèces dispersives peuvent trouver leur origine dans des populations proches. Figure V.7 - Exemple de simulation couplée physique-biologie de dispersion larvaire. Les deux figures montrent la dispersion de « larves » passives après quatre semaines dans le golfe de Gascogne pour deux mois distincts. Elles illustrent la saisonnalité du transport larvaire en fonction de la saisonnalité des forçages hydrodynamiques (variations des débits des fleuves et des régimes de vent). Simulations et graphiques : S.D. Ayata. Plusieurs hypothèses ouvrent des perspectives de recherche prometteuses : l Quel est l’impact de la durée de vie pélagique qui s’avère très variable pour une espèce donnée en fonction des conditions environnementales ou de facteurs maternels ? l Les appréciations des potentiels de dispersion ne sont-elles pas trop « lissées » pour rendre compte de la connectivité réelle des populations ? l Les modèles de dispersion se sont perfectionnés, mais prennent-ils suffisamment en compte la stochasticité environnementale et cette variabilité des traits d’histoire de vie ? Ces points, particulièrement complexes dans le domaine côtier, suggèrent la nécessité d’un effort particulier pour valider les modèles et les paramètres. Un autre champ de recherche concerne les conditions d’utilisation de marqueurs génétiques pour qualifier et quantifier la connectivité. Il reste encore aujourd’hui à déterminer le potentiel des nouvelles technologies de séquençage pour l’étude de la connectivité. L’utilisation de traceurs bio-géo-chimiques pourrait également contribuer à une meilleure estimation de la dispersion, mais ces recherches restent encore trop marginales pour que l’on puisse rapide-
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