Un mécanisme ancestral de l’initiation de la réplication du chromosome bactérien révélé

Résultats scientifiques

La charge de l’hélicase réplicative est une étape critique de l’initiation de la réplication des chromosomes. Des chercheurs de l'Institut de biologie intégrative de la cellule montrent que nos connaissances actuelles sur le déroulement de cette étape reposent sur l’utilisation d’opérateurs d’hélicases non représentatifs de la diversité bactérienne. Grâce à une approche phylogénomique combinée à une analyse fonctionnelle dans Pseudomonas aeruginosa, ils identifient et caractérisent l’opérateur d’hélicases ancestral et prédominant dans le domaine bactérien. Cette étude a été publiée le 10 novembre 2016 dans la revue Nature Communications.

Le rythme auquel les réplications des chromosomes sont initiées définit le taux de croissance. C’est un déterminant majeur de la prolifération cellulaire qui justifie l’attention portée aux mécanismes moléculaires et à la régulation de l’initiation de la réplication pendant le cycle cellulaire dans les trois domaines du vivant (bactéries, archées et eucaryotes).
Chez les organismes modèles bactériens classiques, le chargement de l’hélicase réplicative nécessite un opérateur de type DnaC (chez E. coli) ou DnaI (chez B. subtilis) pour initier la réplication. Jean-Luc Ferat et ses collaborateurs montrent que la distribution des opérateurs de type dnaC/I dans le domaine bactérien est restreinte à quelques phyla seulement, indiquant que ce type d’opérateur n’est pas représentatif du domaine bactérien. Les chercheurs mettent en évidence que ces opérateurs ont été acquis à 7 reprises, au moins, au cours de l’évolution par transfert horizontal puis domestication de gènes d’origine phagique et par la perte subséquente ou simultanée d’un gène qu'ils identifient, dciA (dnaC/I Antecedent). L’analyse phylogénomique de dciA enracine ce gène à l’origine du domaine bactérien et montre que là où il n’a pas été supplanté par dnaC/I, il a persisté (Figure 1). Ainsi, La plupart des bactéries, y compris de nombreux pathogènes (Vibrio choleraePseudomonas aeruginosaYersinia pestisMycobactyerium tuberculosisHelicobacter pylori, …), dépendent d’un système entièrement nouveau pour charger et activer l’hélicase réplicative pendant l’initiation de la réplication. 
Les chercheurs démontrent que la protéine DciA de P. aeruginosa interagit spécifiquement avec son hélicase réplicative homologue, DnaB, et possède toutes les caractéristiques d’un opérateur d’hélicase réplicatives : la suppression de DciA conduit à un blocage spécifique de l’initiation de la réplication. L’identification récente de DciA, la caractérisation de sa fonction pendant l’initiation de la réplication et son implication vraisemblable entre la charge et l’activation de l’hélicase réplicative (Figure 2), conduisent à remettre en cause le modèle actuel de gestion de l’hélicase réplicative pendant l’initiation de la réplication bactérienne.

 

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Figure 1: Distribution des gènes dnaC/I et dciA dans le domaine bactérien. La distribution des opérateurs d’hélicase réplicative est représentée sur un arbre phylogénétique du domaine bactérien fondé sur l’analyse de l’ARNr 16S. Lorsque la présence de dnaC/I ou de dciA dans un phylum (en gras) n’est pas homogène, les classes (souligné) ou les ordres (normal) sont spécifiés. Les valeurs encadrées indiquent le nombre de génomes d’espèces (et non de souches) contenant le gène domestiqué dnaC/I (magenta), dciA (cyan) ou aucun (noir).

© Jean-Luc Ferat

 

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Figure 2: Lors de l’initiation de la réplication, l’hélicase réplicative (DnaB) est recrutée sur le complexe d’initiation (DnaA). L’hélicase est ensuite chargée et activée. DciA est l’opérateur ancestral impliqué dans la gestion de l’hélicase réplicative au cours de cette étape.

© Jean-Luc Ferat

 

 

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