Un nouveau microscope de pointe inauguré au CEMES-CNRS

Physique

Le Centre d'élaboration de matériaux et d'études structurales (CEMES) du CNRS a récemment développé une méthode innovante permettant de scruter les propriétés de la matière à de très petites échelles de temps et d'espace. Afin de valoriser cette découverte et de la rendre accessible à toute la communauté, chercheurs français du CEMES-CNRS et ingénieurs japonais de l'entreprise Hitachi High-Technologies Corporation (HHT) se sont rapprochés et ont conçu un nouveau microscope dans le cadre du laboratoire commun HC-IUMi (Hitachi-CNRS Infrastructure of Ultrafast Microscopy) sur lequel cette méthode sera transférée et optimisée. Cet équipement de pointe est inauguré le 24 septembre à Toulouse.

Les relations entre le CEMES-CNRS et HHT ont débuté dès 2009, alors que le laboratoire français cherchait à acquérir un nouveau microscope électronique en transmission (MET) permettant de réaliser des expériences impossibles avec des instruments conventionnels. Français et Japonais ont ainsi collaboré pour mettre au point un microscope unique en son genre répondant pleinement aux besoins de la recherche.

La MET offre une excellente résolution spatiale, mais possède une faible résolution temporelle. Elle permet en somme d'étudier des phénomènes physiques à l'échelle atomique à un instant donné, et non de suivre leur évolution dans le temps. Pour dépasser cette limite, les chercheurs du CEMES ont développé une source cohérente1 d'électrons ultra-rapide, unique au monde, qu'ils ont de prime abord installé sur un vieux microscope d’HHT. Ce canon d'électrons permet de générer des impulsions électroniques ultra-courtes (quelques centaines de femtosecondes) grâce au couplage d’une nano-pointe métallique et d’un laser ultra-rapide.

Dans le cadre du laboratoire commun HC-IUMi, créée en 2018, cette source sera installée sur un nouveau microscope moderne dont certains éléments clés ont été conjointement conçus par HHT et le CEMES afin de tirer parti d’un maximum des potentialités de la nouvelle technologie ultrarapide. En effet, l'utilisation d'une telle source pulsée cohérente combinée à ce microscope dernière génération permettra entre autres d'étudier des phénomènes physiques, tels que la dynamique des champs électriques, magnétiques, ou de contraintes au sein de nanomatériaux sur des durées très courtes, tout en les observant à l'échelle sub-nanométrique2 .

Le CEMES a réalisé six mois de travaux pour remplir les conditions nécessaires à l’installation d’un tel instrument (stabilité mécanique, électromagnétique et acoustique notamment). L’équipe franco-japonaise a aussi développé une nouvelle lentille dite « double stage » permettant l’injection du faisceau laser dans deux positions au sein de la colonne optique. La fabrication de cette lentille a été réalisée par HHT et les premiers tests ont été achevés avec les équipes du CEMES à l’usine d’HHT à Hitachi Naka (Japon) avant le déménagement du microscope vers Toulouse au printemps 2019.

En combinant cette lentille à la source d’électrons cohérente ultrarapide et à divers accessoires, ce nouveau microscope permettra de développer des nouveaux modes d’observations de la matière. Cet instrument unique offrira au CEMES-CNRS, ainsi qu’à l’ensemble de la communauté internationale, l’opportunité d’étudier la dynamique ultrarapide de la matière sur des échelles allant du micrométre à l’atome et venant ainsi appuyer des pans de la recherche aussi divers que la nanoptique, le femtomagnétisme, la mécanique vibrationnelle, la femtochimie et pourquoi pas la dynamique des macromolécules biologiques.

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Chercheurs du CEMES manipulant le prototype de MET ultra-rapide cohérent « FemtoTEM » © Cyril Fresillon, photothèque CNRS   
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Nouveau microscope au Japon avant démontage © Florent Houdellier, directeur du laboratoire commun HC-IUMi

 

  • 1Avec une source cohérente, le faisceau électronique permettant de visualiser les objets dans le microscope porte une même quantité d'énergie et voyage sur une même trajectoire. Cette excellente cohérence est nécessaire pour visualiser les structures et les champs.
  • 2Un nanomètre (nm) équivaut à 0,000000001 = 10-9 mètres

Contact

Florent Houdellier
Ingénieur de recherche CNRS et directeur du laboratoire commun HC-IUMi
Yoshifumi Taniguchi
Ingénieur Hitachi High-Technologies et directeur adjoint du Laboratoire commun HC-IUMi
Alexiane Agullo
Attachée de presse CNRS