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Brevets et licences

Une solution pour détecter et suivre la pollution des sous-sols

Des chercheurs de l'Institut Femto-ST1, en collaboration avec Total, ont mis au point un système de détection de polluants à travers une couche de sable. Il est fondé sur une nouvelle génération de capteurs passifs (sans alimentation en énergie), interrogés à distance au moyen d'un radar de sol.

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La reconversion d'anciens sites industriels, que ce soit pour y construire des habitations ou pour un usage agricole, impose de savoir détecter les pollutions éventuelles dans le sous-sol, et de suivre leur évolution sur le long terme. Aujourd'hui, le seul moyen est d'effectuer régulièrement des prélèvements et des analyses, une procédure longue et coûteuse. Des chercheurs de l'Institut Femto-ST, en collaboration avec Total, ont développé une stratégie différente : les polluants sont détectés directement sur le terrain, grâce à des capteurs enterrés et à un radar de sol. Dans le cadre d'un projet collaboratif financé par l'ANR2, les chercheurs ont créé une nouvelle génération de capteurs passifs (sans alimentation en énergie) sensibles à la présence de sulfure d'hydrogène (H2S), un sous-produit de nombreuses activités industrielles. Ils ont également adapté l'électronique d'un radar de sol commercial, afin qu'il puisse interroger à distance les capteurs enfouis dans le sol.

Les capteurs développés pour ce projet sont basés sur les ondes élastiques de surface (SAW). Lorsqu'une onde électromagnétique est envoyée sur le capteur, le signal est transformé en ondes élastiques par un transducteur piézoélectrique. Les ondes élastiques se propagent à la surface du capteur, puis sont retransformées en ondes électromagnétiques renvoyées vers l'émetteur. Si le matériau dans lequel se propage l'onde élastique subit une transformation, par exemple en présence d'un polluant, la vitesse de l'onde est modifiée, produisant un déphasage de l'onde électromagnétique, qui est détecté.

Pour capter le polluant, les chercheurs ont déposé sur le capteur une mince couche (250 nm) de polymère contenant des ions Pb2+, avec lesquels le sulfure d'hydrogène possède une forte réactivité. Le procédé est compatible avec la fabrication collective des capteurs sur un wafer3. Pour interroger le capteur, ils ont par ailleurs utilisé un radar de sol disponible dans le commerce, dont ils ont repensé l'électronique, afin d'augmenter sa sensibilité. « Le même principe pourrait-être appliqué à la détection d'autres polluants. Nous y travaillons actuellement », indique Frédéric Chérioux, directeur de recherche CNRS à l'Institut Femto-ST.

L'ensemble du système de détection4 - qui est breveté5 - a été testé en conditions réelles : il est capable de détecter la présence du polluant sous une couche de sable d'un mètre de profondeur. De nouvelles applications de détection de la pollution des sols sont en cours entre Femto-ST et Total, ainsi qu’une réflexion sur la valorisation du nouvel instrument.

 

1 Institut Franche-Comté électronique mécanique thermique et optique – Sciences et technologies (FEMTO-ST ; CNRS/Université de Franche-Comté/École nationale supérieure de mécanique et des microtechniques/Université de Technologie Belfort-Montbéliard)

2 Projet ANR Underground

3 Un wafer désigne une tranche ou une plaque très fine de matériau utilisée pour fabriquer des composants de microélectronique.

4 Sub-surface H2S detection by a Surface Acoustic Wave passive wireless sensor interrogated with a ground penetrating radar. David Rabus, Jean-Michel Friedt, Lilia Arapan, Simon Lamare, Marc Baqué, Grégoire Audouin, and Frédéric Chérioux. ACS Sensors, 5, 1075 (2020).DOI : 10.1021/acssensors.0c00013

5 Brevet « Film de polymère sensible à H2S comportant des fonctions carboxylates et des cations de plomb ou de zinc et capteur passif à onde élastique comportant le film, interrogeable à distance », en copropriété Senseor/CNRS/Total/Université de Franche-Comté, déposé le 13/09/16 et étendu le 14/03/2018 (EP3293518)

Contacts :

Frédéric Cherioux / Directeur de recherche CNRS à l'Institut Femto-ST/ frederic.cherioux@femto-st.fr

Jean-Michel Friedt / Enseignant-chercheur à l'Institut Femto-ST / jmfriedt@femto-st.fr