CNRS La lettre innovation

Les insuffisances rénales et hépatiques aiguës ont des conséquences graves pour les patients. Les mécanismes de mort cellulaire régulée, comme la nécroptose, sont une explication récente de ces pathologies. Une des voies pour les traiter consiste à inhiber une protéine kinase qui intervient dans ce processus. La start-up SeaBeLife, fondée sur des travaux réalisés en partie à la Station biologique de Roscoff et à l'Institut de recherche en santé, environnement et travail, développe une famille de molécules qui inhibent de façon originale ces formes de mort cellulaire régulée.

À l'origine de SeaBeLife, une chimiothèque de quelque 10 000 molécules d'origine naturelle ou issues de synthèses chimiques. De structures très diversifiées, elles ont pour point commun de potentiellement inhiber des enzymes clés en pathologie humaine - les protéines kinases. Le Laboratoire de biologie intégrative des modèles marins² et la plateforme de criblage moléculaire de la Station biologique de Roscoff, KISSf, axée sur la sélection d'inhibiteurs chimiques des protéines kinases, ont mis en évidence une famille de molécules inhibitrices de nécrose régulées. « À partir de la molécule initiale, baptisée sibiriline, le travail avec des chimistes de l’université Claude Bernard Lyon 1 a permis de synthétiser une série de molécules dérivées actives », explique Stéphane Bach, ingénieur de recherche CNRS et responsable de la plateforme KISSf.

Ces molécules brevetées³ ont été testées in vitro et in vivo sur des modèles pathologiques et la start-up SeaBeLife a été créée⁴ pour poursuivre le développement des candidats médicaments. « Le mécanisme d'action originale de nos molécules permet d'envisager des traitements pour de nombreuses pathologies. Nous avons choisi de nous focaliser en priorité sur les insuffisances rénales et hépatiques aiguës, qui aujourd'hui n'ont pas de traitements efficaces et pour lesquelles il sera possible d'obtenir rapidement la preuve de l'efficacité d'une molécule sur un patient », indique Morgane Rousselot, présidente de SeaBeLife.

La start-up a entamé le développement préclinique d'une molécule (études de toxicité, mode d'administration...), qui ciblera en premier lieu l'insuffisance rénale aiguë (le traitement pourra ensuite être adapté au traitement du foie). Cette première étape est financée par une levée de fonds réalisée en juin dernier et grâce au prix remporté au concours i-Lab 2020.

À partir de la mi-2021, des essais précliniques réglementaires d'une durée d'environ 18 mois devraient être suivis des premières phases d'essais cliniques (une deuxième levée de fonds est prévue). L'objectif de SeaBeLife est d'aboutir fin 2024 à un accord avec un laboratoire pharmaceutique susceptible de poursuivre le développement jusqu'à la mise sur le marché du médicament.

La start-up garde des liens étroits avec la Station biologique de Roscoff, afin de prolonger la recherche sur d'autres molécules inhibitrices des kinases, en visant cette fois des maladies dégénératives telles que la DMLA (Dégénérescence maculaire de la rétine liée à l'âge) ou la maladie de Parkinson.

¹ Station biologique de Roscoff (CNRS/Sorbonne Université)

² Laboratoire de biologie intégrative des modèles marins (CNRS/Sorbonne Université)

³ Brevets :

•  WO 2017064216, en copropriété CNRS/Inserm/Sorbonne Université/Université Claude Bernard Lyon 1, publié le 20/04/2017 ;
• WO 2017064217, en copropriété CNRS/Inserm/ Sorbonne Université/Université de Poitiers/ Université Claude Bernard Lyon 1, publié le 20/04/2017.

⁴ Les cofondateurs de SeaBeLife sont Morgane Rousselot, présidente, Claire Delehouzé, directrice technique, Marie-Thérèse Dimanche-Boitrel, membre du conseil scientifique et technique et Stéphane Bach, membre du conseil scientifique et technique.