AMORCE : un accompagnement amont pour propulser davantage de projets vers l’Europe

CNRS

Afin d’inciter les chercheurs et chercheuses à tenter l’aventure européenne, le CNRS propose de les accompagner via l’appel AMORCE (Appui au montage de projet de recherche en coordination européenne).

« Le CNRS vise à augmenter de 25 % son taux de participation aux projets européens, car si les chercheurs CNRS ont un taux de succès supérieur à la moyenne européenne, ils soumettent moins de projets que nos partenaires européens. Pour répondre à cette ambition, la Direction Europe de la recherche et coopération internationale (DERCI) a déployé un ensemble d’actions, dont l’appel à projets AMORCE fait partie », présente Etienne Snoeck, responsable du pôle Europe de la DERCI.

Cet accompagnement financier s’adresse à tous les personnels des plus de 1000 unités de recherche du CNRS souhaitant coordonner un projet collaboratif du programme cadre Horizon Europe avec des partenaires des secteurs public et/ou privé européens. Autrement dit, il aide au montage de tous les projets européens à l’exception des bourses du Conseil Européen de la Recherche (ERC) individuelles.

Son enjeu est simple : convaincre et aider au montage de projets les chercheurs et chercheuses qui ne se sont jamais orientés vers l’Europe, autant que ceux qui souhaitent réitérer l’expérience. Les lauréats sont sélectionnés par un comité de treize membres issus des « groupes miroirs » des différents instruments d’Horizon Europe - des groupes d’experts créés par la DERCI dont les missions sont d’analyser les programmes de travail en provenance de Bruxelles et de diffuser les appels pertinents vers les laboratoires concernés.

Un premier appel qui arrive à son terme

Lancé initialement en janvier 2022, AMORCE a soutenu une première vague de 17 projets sur une vingtaine de propositions reçues. Les lauréats reçoivent une aide allant jusqu’à 10 000 € qui doit être dépensée dans l’année. Seule condition imposée : déposer un projet Horizon Europe.

Parmi eux, Gil Moretto - ingénieur de recherche en astrophysique au Centre de recherche astrophysique de Lyon1  - a déposé et obtenu un EIC Pathfinder. « C’est une ingénieure de projets européens qui m’a incité à postuler à AMORCE alors que je travaillais sur la reproposition d’un projet qui n’avait pas été retenu », explique l’astrophysicien. Son projet, justement, porte sur le développement de miroirs intelligents - contrôlés électroniquement – qui serviront à l’observation directe d’exoplanètes. Il réunit, pour cela, des savoir-faire en astrophysique, en matériaux polymères, en impression 3D et en optique adaptative et réunit trois pays européens.

D’autres lauréats viennent de déposer leurs propositions comme Catherine da Cunha – professeur en ingénierie industrielle au Laboratoire des sciences du numérique de Nantes2 . « La direction de mon laboratoire m’a présenté cet accompagnement en soulignant sa simplicité. En effet, d’autres programmes existent, mais ils sont parfois aussi sélectifs que les projets européens. Avec AMORCE, la sélection était large et il s’agissait vraiment d’un dispositif d’aide et non pas de pré-tri », décrit la chercheuse. Son projet retenu vise à améliorer le paramétrage d’assistants digitaux semi-automatisés dans l’industrie. Une solution 100 % européenne sur un marché dominé par les GAFAM. Celle-ci permettra, à terme, d’accélérer les temps de mise en œuvre de ces assistants et ainsi faciliter leur adaptation à différents secteurs d’activité et contextes sociaux.

Un accompagnement spécifique par des experts de projets européens

Plusieurs accompagnements similaires sont proposés par le Ministère de la recherche et de l’innovation et l’Agence Nationale de la Recherche. AMORCE s’en distingue en assignant un ingénieur de projets européens (IPE) à tous les lauréats issus de laboratoires en délégation CNRS. « Nous avons recruté une trentaine d’IPE l’an dernier. Ces experts apportent leur expérience essentielle dans la rédaction des projets en particulier sur tous les aspects administratifs et financiers, mais aussi sur les parties « Impact » et  « Implémentation » et les questions de « Data Management plan », d’éthique, d’open-science du dossier », décrit Etienne Snoeck.

« Plus tôt on intervient, plus on peut ajouter aux propositions des chercheurs, décrit ainsi Zsoka Bori, IPE dans la délégation Rhône Auvergne du CNRS. Elle a accompagné deux lauréats d’AMORCE, dont Gil Moretto. Pour ce dernier : « son aide nous a économisé toute la partie d’échange avec la machine bureaucratique de l’Europe. Ses conseils sur la clarté et la structure de notre proposition, et le budget demandé ont été très appréciés ».

Accompagnement administratif, juridique, rédactionnel… Les IPE sont formés pour lever les verrous à chaque étape du montage de projet, et ce, jusqu’à son lancement en cas de succès. Leur proximité avec les chercheurs dans les régions facilite également l’organisation de réunions de travail et la mise en place d’un calendrier d’avancement. « Nous observons aussi l’évolution des tendances partenariales. Le retrait du Royaume-Uni a notamment laissé un vide à remplir et de nouveaux partenaires apparaissent en Suisse et en Norvège. On est aussi là pour guider les chercheurs vers ces nouvelles opportunités et les aider à compléter leur consortium », ajoute Zsoka Bori.

Une aide financière non ciblée

« AMORCE permet de monter notre projet sans investir l’argent de l’équipe ce qui réduit le risque et un peu de pression par rapport à l’acceptation du projet », précise Catherine da Cunha. Cette aide financière a permis aux deux lauréats d’aller à la rencontre de leurs partenaires et ainsi consolider leurs consortiums. Par ailleurs, le nombre limité de pages des propositions nécessite de travailler scrupuleusement ses illustrations. C’est pourquoi les deux lauréats ont utilisé les fonds d’AMORCE pour affiner la partie graphique de leurs dossiers. « Je me suis abonné à des logiciels de création et de retouche d’images et j’ai investi dans une caméra haute résolution pour prendre des photos de qualité supérieure de notre prototype », explique Gil Moretto.

Catherine da Cunha s’est quant à elle octroyé les services d’un graphiste : « On pense qu’avoir fait appel à un professionnel qui sait créer rapidement des illustrations compréhensibles devrait aider le jury à mieux se saisir notre proposition ». La chercheuse a également fait appel à des relecteurs spécialistes des projets européens de la Chambre du commerce et de l’industrie.

Convaincre les chercheurs à viser l’Europe

Le premier pas vers l’Europe est souvent le plus compliqué. Les taux de succès sont faibles : 16 % pour le CNRS, contre 11 % en moyenne au sein de l’Europe. « Beaucoup de chercheurs sont craintifs face à la difficulté de monter un projet européen. Notre objectif est de leur montrer les retombées importantes : scientifiques, de visibilité, d’autonomie, d’évolution de carrière, de décloisonnement, etc. », précise Etienne Snoeck. « J’encourage aussi les chercheurs et chercheuses à s’inscrire sur le site de la Commission européenne en tant qu’expert évaluateur », ajoute Zsoka Bori. Cette fonction leur permet de découvrir l’envers du décor, de lire de nombreux projets et de s’imprégner inconsciemment de ce qui est attendu d’eux.

Ceux qui ont tenté l’expérience l’assurent : il y a toujours quelque chose de bénéfique à retirer, que la proposition soit retenue, ou non. Pour Catherine da Cunha, travailler sur le montage d’un projet qui a échoué est particulièrement formateur et initie des collaborations dans d’autres cadres. Selon Gil Moretto, les retours reçus par les jurys sont essentiels afin de retenter sa chance. À ce dernier d’ajouter : « Je sais que peu d’ingénieurs de recherche dans notre institut osent proposer des programmes en Europe. Au contraire, je pense qu’indépendamment de notre statut, il faut foncer, car nous sommes tous là pour faire évoluer la science ».

Désormais, la porte est ouverte à de nouvelles idées. L’appel AMORCE est ouvert du 15 novembre au 31 janvier 2023. Les futurs lauréats seront annoncés début mars prochain.

 

Appel AMORCE: https://international.cnrs.fr/actualite/aap-amorce/
 

Pour s’inscrire en tant qu’expert évaluateur :https://ec.europa.eu/info/funding-tenders/opportunities/portal/screen/work-as-an-expert

 

  • 1Unité mixte CNRS/ENS de Lyon/Université Claude Bernard Lyon 1.
  • 2Unité mixte CNRS/Ecole centrale de Nantes/Nantes Université.