Idylle : l’innovation des laboratoires pour les laboratoires

Innovation

Avec une nouvelle technologie mise sur le marché par mois et 80 % de ses ventes réalisées à l’étranger, l’entreprise Idylle valorise l’économie circulaire de la connaissance.

Créée en 2019 par Mathieu Grisolia, Idylle a su faire ses preuves. Imaginée pour mettre à disposition des scientifiques des outils de recherche innovants–le tout dans le « tempo de la recherche » –la jeune entreprise est dorénavant sur le rythme d’un produit développé par mois, allant d’une nouvelle sonde à un nouveau procédé d’imagerie. « Nous avons rodé une méthode millimétrée qui consiste à faire passer un prototype de laboratoire à un produit robuste, le tout en développant notre savoir-faire industriel », souligne Mathieu Grisolia, fondateur et CEO d’Idylle dont le CNRS est actionnaire au côté de Quattrocento, startup studio en sciences du vivant .

Une méthode qui inclut une logique de rythme, de professionnalisation des prises de contact ou encore de collaborations avec les organismes de transfert. Cela a permis à Idylle, basée à Paris, de roder ses méthodes et outils, et mener une réflexion sur l’apport d’une valeur ajoutée industrielle. « Nous partons d’un prototype purement technologique pour le transformer en un produit qu’on commercialise auprès des chercheurs », insiste Mathieu Grisolia.

Des développeurs avec une envie de partager

Et des prototypes, il y en partout. Thomas Daubon, responsable d’équipe à l’Institut de Biochimie et Génétique Cellulaires1  est ce que l’on appelle à Idylle un « développeur ». Le chercheur a mis au point une expertise de standardisation de structure des cellules dans le cadre de ses recherches sur un cancer cérébral. L’outil, appelé ‘SpheroTribe’ est devenu une technique de base de l’équipe du chercheur et peut être utilisé dans le cadre de recherche pour d’autres types de cancer. « J’ai présenté mon outil au comité d’Idylle et nous avons fait des tests sur le produit. En deux mois, Idylle avait préparé les premiers kits que nous testons actuellement au laboratoire », explique Thomas Daubon. Pour transformer cet outil de laboratoire en produit industriel, Idylle a standardisé la production du réactif mis au point par Thomas Daubon et son équipe, puis bâti un écosystème d’objets qui facilitent l’expérience. « Ils ont eu cette vision de chimiste que je n’ai pas. Cela représente bien le CNRS et ses qualités pluridisciplinaires », ajoute le chercheur. « Les développeurs sont hypers motivés. Ils comblent quelque chose avec Idylle, notamment une envie de partager », indique Mathieu Grisolia. Et c’est cette caractéristique que valorise Idylle : faire du produit le vecteur d’une collaboration scientifique entre utilisateurs et développeurs, tous chercheurs.  

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 SpheroTribe © Idylle

Cette formule gagnante permet à Idylle de proposer chaque mois de nouveaux outils. Une maitrise du temps qui permet à l’entreprise de s’inscrire dans celui de la recherche. « Nous avons gagné en efficacité, cela s’illustre par la durée entre le moment où l’on identifie une technologie potentiellement transférable et la phase de commercialisation. Aujourd’hui, nous pouvons faire ce travail en moins de 12 mois », note Mathieu Grisolia. Car la mission d’Idylle est d’accélérer la recherche en rendant disponible des technologies qui, sans elle, ne seraient pas disponibles, le tout dans une dynamique de co-constructionEn mettant à disposition ces technologies, l’entreprise permet une « économie circulaire de la connaissance » alors que les innovations d’un laboratoire impactent les autres. « Et c’est cela l’ambition de tous les acteurs de la recherche. »

Le bon tempo de la recherche

La technologie Everspark, pour faciliter la préparation des échantillons pour l'imagerie, en est un bon exemple. Le chercheur Florian Siegerist a fait partie des tous premiers utilisateurs de l’outil. Ce chercheur de l'université Medicine Greifswald en Allemagne, qui a travaillé sur les risques thrombotiques des vaccins, était bloqué dans ses recherches et Everspark lui a permis de sauter l’obstacle et gagner plusieurs semaines dans l’avancée de ses recherches. « J’avais pris connaissance de la technologie Everspark sur les réseaux sociaux et j’ai contacté Idylle. A peine l’avais-je commandé, la technologie est arrivée ! Everspark m’a permis de gagner un temps certain dans mes recherches. Sans cet outil, il m’aurait fallu bricoler en laboratoire pour mon imagerie », détaille Florian Siegerist. Aujourd’hui, il est un utilisateur de deux nouveaux produits développés par Idylle. « J’apprécie particulièrement la façon dont Idylle me permet d’avoir un aperçu des nouvelles technologies », ajoute le chercheur. 

Et la notoriété grandissante de l’entreprise lui a permis d’atteindre plus d’utilisateurs. Lorsque Idylle lance un produit en commercialisation, l’entreprise prend contact avec des utilisateurs qui pourraient être intéressés.« Nous lisons des papiers, nous identifions dans les articles de recherche des scientifiques concernés. Et réciproquement nous identifions de nouvelles technologies et leurs besoins », explique Mathieu Grisolia.

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La technologie Everspark a permis au chercheur Florian Siegerist de débloquer ses recherches. © Idylle

Aujourd’hui, l’entreprise se concentre sur les outils de recherche de laboratoire avec en particularité deux domaines : l’imagerie et la préparation d’échantillons. « A l’avenir, nous aimerions étendre notre expertise sur toute la chaine de travail d’un chercheur. »

Parmi les exemples d’outils mis à disposition des chercheurs, une sonde pour imager le réticulum endoplasmique, une autre pour imager la mitochondrie ou encore un dispositif pour compresser les cellules et réaliser l’imagerie. « Tous ces outils produits à partir de technologies récemment publiées ont permis des avancées dans des domaines de pratique expérimentale. »

80 % de ventes à l’étranger

Et si Idylle produit en large majorité des outils inventés dans les laboratoires français, 80 % de ses clients se trouvent à l’étranger. « Nous suivons les communautés de recherche et, par définition, ces communautés sont internationales. » Les commandes se font en dehors de la sphère d’influence franco-française d’Idylle. « Cela reflète notre capacité à travailler avec les communautés de recherche et à exporter l’excellence des laboratoires français avec cette ambition d’accélération de la recherche. » Une capacité d’export et d’internationalisation « enthousiasmante » qui renforce les réseaux de recherche à l’international. « C’est notre mission de marque. » Les succès des produits sont les succès des développeurs, et peuvent à terme créer de nouvelles collaborations de recherche.

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Idylle produit en large majorité des outils inventés dans les laboratoires français pourtant 80 % de ses clients se trouvent à l’étranger. © Idylle

A l’avenir, Idylle souhaite continuer sa mission d’accélération de la recherche en fournissant « les meilleurs produits au meilleur moment ». L’entreprise souhaite ainsi augmenter son rythme de mise à disposition de produits pour proposer encore plus de solutions. « Il existe une profondeur énorme de technologies. » Mais Idylle souhaite aussi étendre son expertise à d’autres domaines des sciences du vivant. « Nous nous intéressons également au développement de technologies qui nécessitent des compétences complexes telles que la mécanique ou l’électronique embarquées. » De quoi annoncer de beaux jours pour l’avancée des connaissances en laboratoire.

  • 1CNRS/Université de Bordeaux.