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Toujours plus populaire, l’impression 3D ne se repose pas sur ses lauriers et repousse encore ses limites. Le système Discribe, mis au point par l’Institut Jean Lamour1, crée ainsi des motifs cinq cents fois plus petits qu’auparavant, grâce à une nouvelle manière de déposer les matériaux par plasma froid. L’appareil ouvre de nombreuses possibilités pour les microsystèmes et les marqueurs invisibles.
Fabriquant aussi bien des objets de consommation courante que des maisons, les imprimantes 3D s’aventurent désormais dans le monde nanométrique. Développée par l’équipe de Thierry Belmonte de l’Institut Jean Lamour1, la technologie Discribe brevetée2 par le CNRS repousse les frontières en matière de résolution. Alors que les précédents appareils du même type déposaient de la matière sur une largeur d’environ 50 micromètres minimum, ce système descend jusqu’à 100 nanomètres. En clair, il peut fabriquer des motifs 3D 500 fois plus petits qu’auparavant. Sa vitesse d’écriture, d’une dizaine de micromètres par minute, le réserve à des opérations d’une extrême précision.
Discribe fonctionne par dépôts chimiques en phase vapeur, assistés de plasmas froids3. Un matériau précurseur, sous forme gazeuse, est expédié par des capillaires au contact d’un plasma froid, ce qui le fait réagir chimiquement pour former le produit final. Sous atmosphère contrôlée4 et à pression ambiante, même les composés thermosensibles peuvent être manipulés.
Le procédé permet de déposer successivement et de mélanger des matériaux aussi divers que les métaux, les céramiques et les polymères plasma5. Le système reste fixe, seule la table XYZ où sont façonnés les motifs se déplace en fonction des commandes informatiques.
Pour atteindre ce degré de précision de 100 nanomètres, l’équipe a contourné plusieurs difficultés et notamment celle liée à la longueur de Debye6. En effet, les plasmas ne peuvent se former sur une longueur inférieure à cette valeur, qui varie selon différents paramètres. Comme les systèmes précédents faisaient transiter les gaz à travers le plasma, la résolution d’impression était limitée à la taille de ce dernier. Les chercheurs ont innové en séparant la source plasma de l’injection du précurseur.
La matière ne passant plus à travers le plasma, mais à côté, la résolution ne dépend plus de lui. Elle découle du diamètre des capillaires transportant le précurseur et qui peut être de 100 nm voire moins. Ces capillaires sont fabriqués à partir de verres borosilicatés, chauffés par laser et étirés à vitesse constante. Ils sont utilisés à l’origine en médecine, par exemple pour manipuler des ovules.
Non contente d’emmener l’impression 3D en dessous du micromètre, la technologie Discribe permet également de graver la matière. Certains précurseurs fluorés ou chlorés attaquent ainsi chimiquement les matériaux à usiner. La technique est encore en phase de tests et doit être affinée. L’équipe de l’IJL cherche également à façonner des motifs 3D avec des matériaux composites ou des alliages, potentiellement par dépôts successifs ou système à multi-injection.
L’équipe s’est mise en lien avec divers industriels afin de développer des applications pour le système Discribe. En ligne de mire : le domaine des microsystèmes et des microdispositifs électroniques, mais aussi celui de la lutte contre la contrefaçon. Des marqueurs de moins d’un micron, par définition invisibles et indétectables au toucher, pourraient ainsi être apposés sur différents objets. Seul un appareil spécifique révélerait leur origine. En horlogerie ou en bijouterie, ces dépôts invisibles pourraient protéger certaines surfaces des frottements sans en modifier l’apparence.
1 Institut Jean Lamour (CNRS/Université de Lorraine)
2 Brevet WO2015052396 A1 en proprieté CNRS publié le 16/04/2015.
3 Ces plasmas sont dits « froids » par comparaison aux plasmas chauds qui dépassent tous des millions de degrés. Certains peuvent fonctionner à température ambiante.
4 Dans une boîte à gants remplie d’azote ou d’argon, afin d’éviter tout risque d’oxydation.
5 Ces molécules possèdent des chaînes plus courtes que les polymères classiques, mais gardent des propriétés proches de ces derniers.
6 Echelle spatiale au-delà de laquelle une séparation significative des charges peut avoir lieu.